Dettori : “Ce qu’a réalisé Dubai Millennium n’a pas été apprécié à sa juste valeur”
Par Franco Raimondi
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Sept victoires dans le Prix Jacques le Marois, cinq dans le Prix Morny, trois dans le Prix Jean Romanet et deux dans le Prix Maurice de Gheest. Lanfranco Dettori a gagné tous les Grs1 du mois d’août à Deauville sauf un : « Oui, je le sais… C’est le Prix Rothschild. Je n’ai jamais remporté cette course même avant qu’elle ne devienne Gr1. Je m’en suis rendu compte cette année à la déclaration des partants… J’ai gagné presque toutes les grandes courses du meeting estival. Idem pour les Listeds. J’ai toujours adoré me rendre à Deauville où j’ai un excellent feeling. L’année que je ne suis pas près d’oublier, c’est 2020. En pleine période de Covid, il était difficile de voyager et en pleine saison, je me suis installé à Deauville une douzaine de jours. Je suis rentré chez moi avec un doublé Jacques le Marois – Morny, un succès dans le Gontaut-Biron (Gr2) avec Mishriff (Make Believe) et le coffre à bagages de ma voiture plein de baguettes, fromages et autres gourmandises de Normandie. C’était une période complexe pour tout le monde et ce séjour deauvillais m’a donné les ressources nécessaires pour repartir du bon pied… »
Un lieu de cœur
Deauville, c’est la ville des courses au quotidien, avec une excellente ambiance, soit quelque chose de très inhabituel pour Lanfranco : « Notre métier est très dur, il faut toujours être au top, être compétitif… Pourtant, à Deauville tout le monde est plus relax qu’ailleurs… Dans le vestiaire, il y a moins de “sales histoires” qu’au cours des autres temps forts de la saison. Une défaite est plus facile à “avaler” à Deauville qu’à Royal Ascot ou que lors du meeting de l’Arc où l’on est tous bien plus tendus, voire “agressifs”. Il y a plusieurs raisons à cela. Déjà , la piste est très simple à appréhender, sans véritable piège : tout le monde a sa chance… à moins de vouloir se tirer une balle dans le pied. Mais, bien sûr, l’ambiance est également capitale. Le soir, on se retrouve à la même table et on joue les prolongations chez Régine ou ailleurs. Cela aide grandement à décompresser… J’ai également passé quelques jours à Deauville lors d’un premier voyage délicieux avec ma femme, Catherine, qui était alors ma fiancée. Bref, j’ai toujours adoré Deauville même lorsqu’un goéland avait décidé de s’oublier en survolant mon assiette ! »
Dubai Millennium, le plus grand
Dimanche, Lanfranco Dettori n’a qu’un partant dans la réunion. Ce sera son dernier Marois. Un Gr1 où il aura l’opportunité d’atteindre les huit succès, mais également d’y signer une quatrième victoire de rang ! Le pilote n’a aucun doute lorsqu’il évoque son “meilleur” vainqueur du Marois. Il s’agit de Dubai Millennium (Seeking the Gold) : « Un vrai crack, et je pense que ce qu’il a réalisé n’a pas été apprécié à sa juste valeur. En effet, si on fait abstraction de sa défaite dans le Derby, il a terminé sa carrière invaincu, ne trouvant jamais un cheval en mesure de le faire galoper sur le gazon ou le dirt, de 1.600 à 2.000m. » Aucun doute également en ce qui concerne sa victoire la plus ténue. Elle a été obtenue en selle sur Al Wukair (Dream Ahead) : « J’étais situé entre les deux Godolphin, Inns of Court et Thunder Snow. Nous étions battus d’une courte tête une foulée avant le poteau mais également une foulée après ! Mais, sur le fil, la victoire était bien là  ! »
Inspiral, pour oublier Goodwood
La dernière chance de Dettori se nomme Inspiral (Frankel), tenante du titre et qui vise un doublé historique. Il faut remonter à  1987 et 1988, alors que Lanfranco était encore apprenti, pour trouver une pouliche, une certaine Miesque (Nureyev), en mesure de remporter le Prix Jacques le Marois à deux reprises : « Il ne faut pas jouer au jeu des comparaisons entre une pouliche de très grande classe – comme Inspiral – et une championne telle que Miesque. Mais je reste confiant. Si l’on efface de sa musique sa performance dans les Sussex Stakes (Gr1), elle serait sans doute favorite. La course de Goodwood ne compte pas car elle évoluait sur un terrain extrême qu’elle déteste et a été victime d’un scénario de course très tactique. Nous nous faisions du souci avant la course et j’ai cherché à prendre le rail situé le long de la lice des tribunes afin de venir porter l’estocade à  Paddington (Siyouni)… mais j’ai très vite compris que ce dernier était imbattable et je n’ai pas voulu donner une course dure à Inspiral dans l’optique du Marois. Elle va courir à onze jours mais a bien récupéré, et le scénario dimanche sera très différent. Déjà le terrain va bien l’aider. D’un point de vue tactique, la course s’annonce très rapide : Big Rock (Rock of Gibraltar) est un poulain dur qui aime aller devant. Tout comme Triple Time (Frankel) et Hi Royal (Kodiac). Je peux attendre et profiter du train de course avant de placer la pointe de vitesse de ma pouliche. En plus, Deauville est une piste facile où l’on peut se faire sa place… » Tous les feux sont au vert et, avec un peu de chance ou plutôt un peu de réussite, Lanfranco Dettori pourrait faire ses adieux à Deauville avec un dernier saut de l’ange. Pour trotter sur la plage, il aura bientôt tout le temps de revenir en touriste…