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mercredi 19 mars 2025
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MATTHIEU PONSON : « LES COURSES, C’EST ADDICTIF ! »

MATTHIEU PONSON : « LES COURSES, C’EST ADDICTIF ! »

Entrepreneur à succès, reconverti en vigneron à la quarantaine, Matthieu Ponson a l’esprit cartésien propre aux ingénieurs. Pourtant, samedi à Auteuil, la victoire de Shokdor (RS) dans le Prix Le Touquet (L) l’a ému aux larmes. Matthieu Ponson vit sa passion des courses à fond. Parce qu’il ne sait pas faire autrement…

Par Adeline Gombaud

ag@jourdegalop.com

Lundi matin. Lorsqu’il nous répond, Matthieu Ponson est sur la route pour Lyon, où il doit livrer des bouteilles du vin issu de son domaine proche du Ventoux. Le propriétaire de Shokdor (Seabhac), Ocre (Jeu St Éloi) ou Lorenzo du Chenet (Spanish Moon) n’a pas encore évacué l’adrénaline que lui a procurée la journée de samedi. « Cela a commencé par la victoire de Royal Louis Has à Senonnes. J’ai suivi la course depuis le Karly Flight où j’avais convié des amis à déjeuner… C’était ensuite à Lorenzo du Chenet d’entrer en jeu. Pour la première fois de ma vie, l’un de mes chevaux était favori du Quinté ! Tout se présentait pour le mieux : le cheval était top, le terrain pour lui, le cheval qui nous avait devancés la dernière fois, Titi de Paris, finalement non-partant. Et à la réception de la troisième haie, patatras, la selle avance, le jockey doit arrêter le cheval. Énorme désillusion… »

« Quand je m’implique j’y vais à fond »

La journée n’est pas pour autant terminée. Deux heures plus tard, Shokdor effectue sa rentrée dans le Prix Le Touquet. « Il nous restait Shokdor dans la Listed, mais avec des points d’interrogation… Le cheval n’avait jamais sauté le steeple d’Auteuil et il faisait une rentrée. Gabriel Leenders le trouvait top, Felix de Giles était venu sauter le matin… Shokdor, c’est un cheval que nous avons toujours beaucoup aimé. L’an dernier, nous voulions courir une préparatoire au Congress puis le Gr2. Mais il a souffert d’un abcès au pied, qui s’est avéré plus embêtant que prévu. Il a fallu être patient, très patient. Le cheval a été remis en route par l’équipe d’Éric Ventrou. Malgré son immaturité, Shokdor a gagné de bout en bout. Je ne pleure pas souvent. Mais samedi, j’ai pleuré. L’épisode Lorenzo était oublié ! Dans les moments où mes chevaux finissent derniers, quand un poulain s’accidente à l’élevage, quand rien ne va, ma femme me demande pourquoi je fais ça. Les courses vous apportent des émotions difficilement explicables. C’est addictif ! Je suis d’une nature passionnée et, quand je m’implique, comme avec le vin, j’y vais vraiment à fond. »

Plus tôt dans la semaine, Ocre lui avait permis de remporter une autre Listed, le Prix Spumate, à Compiègne. « J’ai une relation encore plus particulière avec Ocre, car je l’ai achetée foal à son éleveur, Karine Perreau. J’ai encore des photos d’elle tout bébé avec mes enfants… Je n’ai pas pu être présent à Compiègne mercredi. Mais quand Jehan [de Balanda, ndlr] m’a appelé pour débriefer du succès, je suis sorti de la cave où j’étais, je me suis isolé et là aussi j’ai pleuré. Depuis deux jours, je repasse en boucle ces dernières victoires ! Je suis conscient de la chance que j’ai. »

Paray, la chasse, les charolaises… et les courses !

Rien ne prédestinait Matthieu Ponson à devenir propriétaire. En prépa scientifique à Lyon, il se lie d’amitié avec un camarade, Pierre Polette, dont le père, André Polette, a quelques juments au milieu de ses vaches charolaises, à Paray-le-Monial. « Nous étions tous les deux chasseurs et, le week-end, j’allais souvent chez les Polette pour chasser. De temps en temps, André Polette nous disait : « Demain, on ne chasse pas, on court ! Mettez une chemise et des mocassins. » C’est ainsi que j’ai découvert les courses. Nous allions à Lyon, Moulins, Paray, sur ces hippodromes où l’on peut voir de tout près les chevaux dans l’effort. J’ai été saisi par la puissance de l’animal, la beauté du spectacle. André Polette avait ses chevaux chez Marc Pimbonnet. Plus tard, quand il avait un partant, j’essayais d’aller le voir. Quand il a arrêté son activité, nous avons, avec mon frère et son fils et contre son avis, repris deux de ses pouliches. Nous étions jeunes salariés, sans beaucoup de moyens. Nous avons confié les pouliches à Marc Pimbonnet, mais nous n’avions pas imaginé qu’elles n’allaient pas courir tout de suite… Au bout de trois mois, nous avons compris que nous n’avions pas les moyens de nos ambitions et nous avons rendu les pouliches… À la suite de cette expérience avortée, je me suis un peu écarté des courses, même si je jetais un œil à la télé quand j’allais boire mon café dans un PMU. »

De Lugdunum Racing aux Dragons…

C’est en 2017 que Matthieu renoue avec sa passion d’étudiant. Un an avant, il avait changé de vie, vendant les parts de la société qu’il avait fait prospérer, Sogelink, pour vivre à fond sa passion du vin. Il crée le domaine de Piéblanc, au pied du mont Ventoux. « À cette époque, un ami expert-comptable, Régis Lacroix, me parle d’un certain Hervé Thouvenel, qui vient de lancer une écurie de groupe, Lugdunum Racing, du côté de Lyon. Je rencontre Philippe Decouz, à qui étaient confiés les chevaux, et je prends une part. Première course à Lyon. J’y vais. L’émotion, celle qui m’avait fait vibrer étudiant, me revient en pleine figure. Je comprends vite qu’un trentième de cheval, sans rien décider, cela ne va pas me convenir. J’ai une âme d’entrepreneur ! Je passe le cap, et je demande mes couleurs. Je crée l’écurie des Dragons, en référence au Vietnam, pays qui m’est cher et où j’ai adopté mes enfants. Ma casaque d’alors fait référence à celle des Polette, ravis que je reprenne le flambeau… J’avertis Philippe de mon projet, et en avril 2018, nous voilà partis à La Teste pour la breeze-up Osarus… »

… et des Dragons à Searching

On ne se refait pas (totalement), et Matthieu Ponson cherche la martingale pour « bien » acheter. « J’ai pris le catalogue et j’ai fait un tableau Excel, où, pour chaque lot, je mettais des notes en fonction du pedigree… J’ai passé des nuits entières sur mon ordinateur ! J’en tire un top dix, que je montre à Philippe. Arrive la journée des breezes et des inspections. Ocagna plaît à Philippe, et elle fait partir de mon top dix. Nous l’achetons 27.000 €. Sans être une championne, elle nous apporte beaucoup de joie en terminant treize fois dans l’argent pour quinze sorties ! J’ai ensuite fait l’erreur classique du débutant. Je l’ai gardée à l’élevage, alors qu’elle n’avait ni le papier ni le physique pour faire une bonne mère… Elle vient de pouliner de son quatrième produit. Les deux premiers n’étaient vraiment pas bons… »

Les mois passent et les victoires tardent à arriver. Matthieu fait alors connaissance avec son plus proche voisin, Hervé de Watrigant. « Je ne pouvais pas mieux tomber ! Hervé est né dans les chevaux, comme tous les membres de sa famille… C’est un fou de pedigrees. Il a fait presque tous les métiers en relation avec les courses. Lors d’une période de méforme, alors que nous discutions avec Jehan de Balanda, devenu lui aussi un ami, Jehan me lance : « As-tu pensé à changer de casaque ? » Hervé m’explique que ses couleurs sont toujours disponibles, sous le nom de Searching, une société qu’il avait créée à l’époque, du nom d’une aïeule d’Allez France… Casaque beige, toque verte : je relance Searching, y associe Hervé, et nous décidons de changer de méthode. Hervé me conseille de mieux sélectionner mes achats… Je me focalise sur l’obstacle, conscient que j’ai peu de chances de tutoyer l’élite en plat ! »

Peu à peu, l’équipe se met en place. Hervé de Watrigant agit comme un conseiller de l’ombre et, pour les achats, Matthieu Ponson essaie de calmer ses ardeurs, tout en faisant intervenir les courtiers. « La première fois que je suis allé aux ventes de Deauville, j’ai adoré. J’étais comme un fou… J’ai acheté deux pouliches, et les deux étaient nulles ! J’ai compris que je devais me faire conseiller par des gens dont c’est le métier. Nicolas de Watrigant réalise la majorité de mes achats, mais Nicolas Bertran de Balanda m’a aussi acheté quelques chevaux… Je vous rassure : j’ai arrêté les tableaux Excel depuis longtemps ! Un peu comme avec le vin, j’ai compris qu’on ne pouvait pas contrôler la nature. J’ai arrêté d’essayer de comprendre ! Néanmoins, en sélectionnant modèle et pedigree, on a statistiquement plus de chances d’acheter un futur bon cheval… »

Communication et respect du cheval

Les chevaux sont répartis chez différents entraîneurs : majoritairement Jehan de Balanda, mais aussi Gabriel Leenders, Donatien Sourdeau de Beauregard et Matthieu Pitart, et plus récemment Étienne d’Andigné et Noel Georges et Amanda Zeterholm. « J’adore aller à l’entraînement. Si je devais habiter en région parisienne, je choisirais Maisons-Laffitte ! Je ne peux pas dire que je donne carte blanche à mes entraîneurs. Bien sûr, ce sont eux les pros, mais j’aime être partie prenante des décisions comme le choix des engagements ou celui des jockeys. S’il y a bien un point où mon esprit cartésien se régale, c’est celui des engagements ! Je passe chaque jour une heure, parfois deux ou trois, à m’occuper de l’écurie. Donc forcément, j’ai choisi des entraîneurs avec qui la communication est fluide. Je ne suis pas de ceux qui ne s’intéressent qu’à la course. J’aime suivre mes chevaux, à l’élevage, au pré-entraînement, mais aussi dans leur reconversion… Et j’aime travailler avec des gens qui s’impliquent vraiment dans leur bien-être. C’est le cas du haras où sont stationnées mes poulinières, le haras de la Tour de Delphine Gronfier, ou des structures où ils sont dressés et/ou ils bénéficient de vacances. Je travaille depuis quelques mois avec Éric Ventrou, mais aussi avec Nicolas Moisson, du côté d’Angers, ainsi que Florent Augustin ou Béatrice Nicco, dans le Centre-Est. J’aime établir des plans de carrière, dans le respect du cheval. On demande beaucoup aux sauteurs quand ils sont à l’entraînement. Il me semble important qu’ils puissent bénéficier de breaks chez des professionnels où ils peuvent alterner paddock et travail, voire piscine… »

Si sa femme et ses enfants désormais adolescents suivent sa passion avec un peu de distance, Matthieu Ponson aime partager avec ses proches. « Les courses, c’est aussi un moment de convivialité. Nous avons un petit rituel de déjeuner avant les réunions d’Auteuil. Parfois, j’emmène des amis néophytes. Même si j’aime rester dans ma bulle juste avant que l’un de mes chevaux coure, je m’arrange pour leur faire découvrir toutes les coulisses avant ce moment si particulier. Ils n’ont pas encore sauté le pas du propriétariat, mais j’y travaille ! »

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