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samedi 1 février 2025

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LÉGENDES DES COURSES HIPPIQUES FRANÇAISES

HALL OF FAME

LÉGENDES DES COURSES HIPPIQUES FRANÇAISES

En cette fin d’année, JDG crée le premier « Hall of Fame des courses hippiques françaises ». Un projet pour honorer les grands acteurs du galop. Découvrez chaque jour les premiers intronisés… 

Aujourd’hui : Al Capone II (1988 – 2020)

Né dans la Nièvre en 1988, le physique d’Al Capone ne le prédestinait pas forcément à la carrière qui fut la sienne. C’était sans compter une âme de guerrier, de bonnes origines et le talent des hommes qui l’ont entouré, du pré aux pistes d’entraînement et sur le champ de courses. Cheval difficile dans sa jeunesse, de petite taille (1,62 m), son palmarès et sa longévité, en course comme à la retraite, ont fait de ce sauteur une véritable légende.  

C’est chez un jeune éleveur, Jacques Cyprès, fan du film Le Parrain, que débute l’histoire d’Al Capone II. Le propriétaire Robert Fougedoire se rend donc en 1990 à Montigny-sur-Canne, dans la Nièvre, pour voir les poulains. À cette époque, les demi-sang ne se vendent pas encore outre-Manche et il est précurseur de s’intéresser aux chevaux autre-que-pur-sang (AQPS) du centre de la France. Accompagné de son entraîneur, un certain François Doumen, il se laisse convaincre par ce dernier de prendre le poulain, qui n’a pourtant pas un physique de déménageur, mais qui est assez bien fait, avec de beaux points de force selon ses dires.  

C’est également le propre frère cadet de The Fellow, également entraîné par Doumen et qui remportera bientôt les plus grandes courses, en France et en Grande-Bretagne. C’est ce que l’on appelle une bonne inspiration. Ce passionné de chevaux avait déjà été bien inspiré d’épouser l’obstacle, après avoir rêvé de Longchamp et de victoires classiques. Pensant qu’il n’aurait jamais de grandes satisfactions en plat, faute de pouvoir investir dans des chevaux aux origines extraordinaires, il se tourna vers l’autre discipline du galop. En étant un peu malin, avec l’indispensable part de chance, on pouvait selon lui trouver de bons petits chevaux, capables de gagner, et donc de nourrir son plaisir de propriétaire. L’histoire ne va pas tarder à lui donner raison !  

Pour ce qui est des origines du champion, il est amusant de préciser que les demi-sang, AQPS donc, ne seront réellement reconnus comme une race que des années plus tard, en 2005, lors de leur entrée au stud-book français géré par les Haras Nationaux. Les premiers poulains de race distincte AQPS sont donc nés en 2006, même si l’appellation était déjà utilisée par les sportifs et professionnels depuis plus longtemps. L’élevage AQPS provient de deux régions principales : le Centre-Est et le Grand Ouest. Al Capone est en quelque sorte la réunion de ces deux foyers. Sa mère, L’Oranaise, est d’ailleurs un cadeau de mariage de Jacques Cyprès (du Centre) et d’Andrée Couétil (de l’Ouest). Elle se nommait ainsi car sa propriétaire, Lucie Couétil, était originaire d’Oran, en Algérie française. Al Capone lancera la carrière de l’éleveur, ce dernier ayant alors la trentaine.  

Pour la suite, direction Chantilly, où le second épisode débute par quelques coups de théâtre. L’association entre Robert Fougedoire et François Doumen étant dissoute, le poulain sera finalement entraîné par Bernard Secly. Le maître entraîneur est installé à Lamorlaye depuis la fin des années 60 et n’a plus à faire ses preuves, en plat comme en obstacle. L’homme est extrêmement respecté, très aimé des parieurs et parfois craint par ses confrères. Il n’hésite pas à pousser le coup de gueule, même si ça dérange. Un tempérament donc, teinté de malice. Lorsqu’un turfiste lui demande gentiment – tout le monde connaissant la méthode Secly – si c’est le jour J. : “Alors Monsieur Secly, c’est aujourd’hui qu’on lâche la tête ?”, l’entraîneur répond : “Mais mon pauvre Monsieur, si je lâche la tête, elle va tomber !” Un homme de caractère, pour entraîner un cheval qui n’est pas simple.  

Dans l’ouvrage réalisé par Pierre Champion, Heureux qui, comme Al Capone…, son entraîneur avait déclaré qu’étant jeune, son élève était assez nerveux, prenant peur pour un rien sur les pistes d’entraînement. Si bien qu’un jour, à trois ans, il éjecta son jockey, prit la poudre d’escampette et fut bousculé par une voiture. Celui qui sera son fidèle jockey tout au long de sa carrière, Jean-Yves Beaurain, l’avait alors récupéré dans le jardin d’un particulier. Il était alors dans un mauvais état et avait besoin de soins. Al Capone, blessé au genou, restera deux mois dans son box entre des ballots de paille. Après cet événement, Secly a avoué que le cheval était devenu difficile, étant psychologiquement marqué. Mais, en grand champion, il réussit à surmonter cette épreuve pour progresser et atteindre les sommets. Et sa carrière sera longue.  

Al Capone débute en course en 1992 sur l’hippodrome d’Enghien, que n’affectionne pourtant pas son mentor. Il est arrêté (il ne termine pas la course). S’il montre un peu plus de qualité lors de ses compétitions suivantes, c’est à Auteuil, le temple de l’obstacle, qu’il va réellement se révéler. Il ne quittera d’ailleurs plus jamais la piste parisienne jusqu’à la fin de sa carrière. Dès sa première année sur la butte Mortemart, il remporte le Prix Maurice Gillois, qui est la plus belle course de steeple-chase réservée aux quatre ans. Une victoire qui a fait polémique dans l’entourage du deuxième, Nimrouz, qui décide de retirer tous ses chevaux de chez Secly, où ils étaient stationnés.  

Si Al Capone n’est ni très grand – alors que les obstacles le sont (le rail ditch and fence mesure 1,70 m pour 4,10 m de large), ni un pur-sang, donc considéré comme un “diesel”, il possède un moteur de Ferrari ! Ses redoutables fins de courses laisseront souvent les commentateurs sans voix, comme ce fut le cas dans le Prix Ingré en 1997, au cours duquel Chamberko, annoncé vainqueur à mi-ligne droite, devra finalement partager la victoire avec un boulet de canon aux couleurs du Brésil (la casaque rayée jaune et vert est un hommage à l’épouse de Robert Fougedoire, originaire de Rio). Al Capone est atypique, dans son histoire comme dans sa façon de courir, de sauter aussi. Les sauteurs, et plus particulièrement en steeple où les difficultés sont différentes des haies, sont dressés pour reconnaître les obstacles.  

Ainsi, ils évitent de toucher ou même d’effleurer certains obstacles, alors que d’autres se traversent, comme le bull finch. Al Capone, lui, semble compenser sa taille par une manière particulière d’aborder l’obstacle. C’est comme s’il réfléchissait avant de prendre son appel. À l’image d’un cheval de CSO, ses envolées sont très verticales. Et il saute le fameux juge de paix (le rail ditch) comme personne !  

Les victoires s’enchaînent, mais c’est l’automne que le champion préfère, ayant un goût prononcé pour les pistes copieusement arrosées. Si la carrière d’Al Capone est inégalable sur de nombreux points, le fait qu’il ne remporte qu’une seule fois le Grand Steeple-Chase de Paris – ce qui est déjà un exploit – tient au fait que l’épreuve se tient en mai. En 1993, Al Capone a seulement cinq ans quand il affronte son premier Grand Steeple. Et seul le crack Ucello II, grand spécialiste du bon terrain et plus expérimenté, le devance facilement. Il finit donc deuxième, devant son frère The Fellow, cinquième, qui remporte la Gold Cup de Cheltenham l’année suivante et fait déjà partie des rois d’Auteuil. Quelques mois après, Al Capone enlève son premier Prix La Haye Jousselin, dans lequel il prend sa revanche sur Ucello II. Six autres succès suivront dans ce que l’on appelle le Grand Steeple automnal, ce qui est unique et ne sera probablement plus jamais réalisé.   

C’est en 1997 qu’Al Capone remporte enfin la plus belle course d’obstacle au monde, le Grand Steeple-Chase de Paris. Il est alors âgé de neuf ans et il fait chaud. Après un parcours sans encombre, il s’envole sur le plat. Enfin le sacre pour lui. Le troisième pour son fidèle partenaire Jean-Yves Beaurain, qui avait déjà connu la gloire à deux reprises avec Katko, également entraîné par Bernard Secly.  

Impossible d’évoquer la carrière phénoménale de ce champion sans parler des hommes qui l’ont entouré. Et Jean-Yves Beaurain, partenaire de ses victoires comme de ses rares échecs, fut sans aucun doute le plus proche. Tout au long de cette formidable carrière, il lui aura été associé le matin, dans l’ombre de la piste, comme l’après-midi, dans la lumière du stade. Sur les soixante-cinq courses courues par Al Capone, ce sont vingt-six victoires pour un total de 2,6 millions d’euros de gains qui ont été glanés par le tandem. Si les allocations de l’époque avaient été les mêmes qu’aujourd’hui, ce serait encore un record.   

Après une nouvelle deuxième place dans le Grand Steeple, en 1999, Al Capone prend encore sa revanche à l’automne face à Mandarino. L’année suivante, au passage du poteau dans le Prix La Haye Jousselin, Jean-Yves Beaurain lève le bras. Certes, son champion a échoué derrière le phénoménal First Gold, mais il a réalisé une course magnifique. Âgé de douze ans, il sort par la grande porte, sous les ovations du public. C’est désormais sa statue (peu ressemblante) qui accueille les spectateurs dans le temple de l’obstacle. Rares sont ceux qui peuvent se targuer d’avoir été statufiés de leur vivant ! Car Pompon sera aussi solide à la retraite – qui durera vingt ans – qu’en compétition. Le tonton flingueur d’Auteuil reçoit la visite de ses fans jusqu’à l’âge canonique de trente-deux ans.

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