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samedi 1 février 2025

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LÉGENDES DES COURSES HIPPIQUES FRANÇAISES

HALL OF FAME

LÉGENDES DES COURSES HIPPIQUES FRANÇAISES

En cette fin d’année, JDG crée le premier « Hall of Fame des courses hippiques françaises ». Un projet pour honorer les grands acteurs du galop. Découvrez chaque jour les premiers intronisés… 

Aujourd’hui : Marcel Boussac (1889 – 1980)

“Boussac tombe du ciel et saisit en plein vol les 15.000 livres”, titre une caricature britannique de l’époque. Elle fait référence à ses arrivées remarquées dans son avion privé Grumman, cinq minutes avant la course, sur le terrain militaire jouxtant l’hippodrome de Newmarket. Son chauffeur l’attend dans une Daimler pour l’emmener au champ de courses. Et si son cheval vient à gagner, son avion survole l’hippodrome, c’est le “victory tour”. Son flegme scandalise les Britanniques mais c’est bien ça, la marque Boussac, le sceau de l’homme qui a dominé pendant plusieurs décennies le monde des courses hippiques européen, des années 1920 aux années 1950.

Marcel Boussac est né le 17 avril 1889 à Châteauroux. Issu d’une famille spécialisée dans les textiles, il est pendant la Première Guerre mondiale, un “affairiste”, et produit des ravitaillements de guerre pour l’armée française. À la fin de la guerre, il rachète les stocks français et britanniques de toiles d’avion et en fait des vêtements. Le public est conquis, il en fait des blouses, des chemises et invente le fameux pyjama.

Cette réussite fait de lui un milliardaire à vingt-cinq ans. Il décide alors d’investir dans les courses hippiques. Influencé par son ami Gaston de Castelbajac, qui l’incite à entrer dans le monde du turf, mais aussi par une figure tutélaire de l’élevage, Edmond Blanc, il achète le haras de Fresnay-le-Buffard (Orne) en 1919.

Boussac est ainsi avant tout un éleveur dont la démarche est à la fois scientifique et industrielle. Il introduit chez les pur-sang européens du sang américain, cherchant à mélanger les races et pratique des “inbreedings” (principe de consanguinité) au sein de ses souches nouvellement créées.

Boussac ne s’arrête pas aux vastes prairies de l’Orne et envoie ses chevaux courir sur les plus grands champs de courses d’Europe. La casaque orange toque grise est née. Il remporte un premier Prix du Jockey Club en 1921 avec Ramus, deux ans seulement après son arrivée dans le monde des courses. Ses chevaux se font connaître outre-Manche, comme en témoigne la victoire d’Astérus dans les Champion Stakes en 1927, où l’heureux propriétaire gagne le surnom de “The impassive French man”. En effet, aucune émotion ne transparaît lorsque son représentant prend la tête du peloton à mi-ligne droite. Dans les années 1930, les usines Boussac tournent à plein régime, mais aussi l’écurie. Une certaine Corrida réussit même le premier doublé de l’histoire pour une jument dans le Prix de l’Arc de Triomphe (1936 et 1937).

Boussac franchit le Rhin avec Corrida, qui remporte le Prix de la Capitale du Reich (1937). Cette même frontière est franchie en 1940 par les Allemands, avec qui Boussac fait affaire, tout comme il le fait avec le régime de Vichy. Il se lie d’amitié pendant la Seconde Guerre mondiale avec des ministres vichystes et notamment Fernand de Brinon, représentant du gouvernement auprès des autorités d’occupation à Paris, qu’il invite à assister à l’entraînement de ses chevaux et à monter un galop en sa compagnie en 1942. Il profite de la disparition de certaines casaques, comme celles de Maurice Rothschild, Paul Wertheimer, des Stern, Wildenstein et de l’absence des concurrents anglais, pour remporter un nombre incalculable de courses entre 1941 et 1944 avec des chevaux comme Djebel ou Esmeralda. Le Pariser Zeitung du 15 juillet 1941 le décrit même comme “un des propriétaires de chevaux de course français les plus sympathiques” (einer der sympathischsten französischen Rennstallbesitzer).

Les actes de collaboration de Boussac n’empêchent pas les Allemands, en la personne du Doktor Pulte, chef des Haras du Reich, de réquisitionner une partie de son écurie : en premier lieu le grand Pharis, recordman des cent mètres dans le Grand Prix de Paris en 1939. En 1941, après le refus du propriétaire d’envoyer son champion dans les Haras allemands, un commando vient récupérer le cheval dans son box. Boussac refuse de donner à Pulte les papiers de l’étalon et les descendants du cheval nés en Allemagne ne peuvent ainsi pas fouler un champ de courses. Le cheval, lui, sera ramené sur ordre de Churchill en 1945. La championne Corrida connaît une destinée plus tragique et meurt pendant la bataille de Normandie en 1944.

S’étant assuré de maintenir quelques liens avec les Forces Françaises de l’Intérieur et notamment Ali Khan, fils de l’Aga Khan III, qui résistait avant la Libération, il échappe à l’épuration.  

Après la guerre, il est seul en piste dans le monde industriel français. En juillet 1946, il croise un modéliste avec qui il crée une nouvelle maison de couture, l’homme du new-look, Christian Dior, pour lequel il loue un hôtel particulier au 30 avenue Montaigne. En 1951, il possède cinquante-deux usines et emploie 21.000 salariés, c’est l’homme le plus riche de France. Il est invité chez les plus puissants, de l’Américain Truman au Soviétique Krouchtchev, et donne même un entretien remarqué à la Pravda en 1959, où il se fait un militant de l’accroissement des relations commerciales entre la France et l’URSS.

La carrière hippique de Boussac passe à un stade industriel. En 1950, il remporte une des rares épreuves manquantes à son palmarès, le Derby d’Epsom, avec Galcador. Il possède quatre cents chevaux, deux haras, Fresnay-le-Buffard auquel s’ajoute Jardy, ainsi que l’hippodrome de Saint-Cloud. Les produits de son étalon Pharis lui sont réservés et quand, pour revitaliser l’écurie, il décide de vendre un cheval, il refuse de le céder en Europe pour s’épargner la concurrence. Il crée sa race, réalisant des inbreedings entre ses étalons. Coronation, qui remporte le Prix de l’Arc de Triomphe en 1949, en est un symbole. Il achète dans cette même décennie le journal L’Aurore, mais aussi Paris-Turf en 1957. En 1959, il est élu président de la Société d’encouragement.

Dans les années 1960, le Boussac que l’on connaît semble un peu dépassé par les événements et notamment la décolonisation qui lui fait perdre des parts de marché, en raison de ses investissements dans les colonies. L’homme d’affaires perd de son “flair”. Les représentants de la race Boussac s’illustrent moins sur les champs de courses. Si Elizabeth II lui rend visite dans son haras en 1967, cette période marque le début de la fin d’un empire. Acamas remporte, certes, le Prix du Jockey Club en 1978, mais l’empire se disloque dans les années 1970. C’est la faillite de Boussac. L’écurie est vendue la même année à l’Aga Khan IV. Boussac se retire dans sa seule propriété de Sologne, où il meurt le 21 mars 1980.

Un journaliste écrit en 1942 que “[Marcel Boussac] ne parle point : il disserte” (J.-L. Chassereau). Sa méthode dans l’industrie qui en a fait “l’un des derniers représentants des féodaux industriels du XIXe siècle” s’applique aussi à l’élevage où l’on ne tarit pas d’éloges sur sa méthode. Si ses chevaux ont obtenu pléthore de succès, du Prix Djebel au Prix Corrida, il obtient lui aussi une course à son nom. Le chroniqueur Louis Déniel a même proposé de rebaptiser le Prix de l’Arc de Triomphe à son nom. Le Critérium des Pouliches, Groupe 1, est nommé Prix Marcel Boussac en octobre 1980.

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