Luciano Salice, “monsieur Falbrav”, n’est plus

Luciano Salice, grand éleveur et propriétaire italien, était un grand travailleur et un homme pressé. Il avait un rendez-vous avec son crack Falbrav (Fairy King) et, à 88 ans, il est parti le retrouver, dans un paddock au paradis des chevaux et des hommes qui les aiment. Les deux ont beaucoup de belles histoires à se raconter, en argot milanais bien sûr. Luciano Salice, grand industriel, a acheté son premier cheval, nommé Caffé, en 1965 pour la chasse et il a gagné avec lui plusieurs courses comme gentleman. Il a franchi un palier après l’autre : propriétaire et dans la foulée éleveur sans terre, en faisant confiance aux professionnels. Ses chevaux achetés aux ventes ont tous porté des noms en argot milanais commençant par S alors que ceux qu’ils élevaient étaient nommés avec un F, comme Francesca, sa fille. Falbrav (sois sage) a gagné 8 Grs1 dans cinq pays différents, de 1.600 à 2.400m : Premio Presidente della Repubblica et Gran Premio di Milano en Italie, Japan Cup, Prix d’Ispahan, Eclipse Stakes, Juddmonte International, Queen Elizabeth II Stakes et pour terminer en beauté la Hong Kong Cup avec un petit regret : ce jour glorieux à Sha Tin, son bien aimé Lanfranco Dettori portait la casaque de Teruya Yoshida selon le contrat de vente du cheval.

Luciano Salice avait droit à deux breeding rights de son crack et, pour lui offrir un joli cadeau de mariage, il avait acheté pour 320.000 €, un record qui n’a pas encore été battu en Italie, la jument sortant d’entraînement Frottola (Muhtharram). Avec sa quinzaine de poulinières, des saillies sélectionnées, ses entraîneurs (Alduino et Giuseppe Botti, Mil Borromeo, Luciano D’Auria et Bruno Grizzetti en Italie, Luca Cumani et Marco Botti en Angleterre), il a connu une vraie réussite. Il a élevé un gagnant de Groupe par Falbrav, nommé Fanunalter, et il a foncé en s’offrant comme poulinière Rosa del Dubai (Dubai Destination), lauréate de Gr3 en Italie, car il voulait retrouver la souche historique qui avait produit le premier gagnant du Prix de l’Arc de Triomphe italien, Ortello (Teddy), qui avait triomphé en 1929. Rosa del Dubai lui a offert son dernier grand succès, les Oaks d’Italia (Gr2), avec sa pouliche Folega (Oasis Dream). C’était en 2017 et le Sciur Salice a levé le pied en douceur. Il a vendu ses juments. Il disait toujours : « Ne parlez pas de moi mais plutôt de mes chevaux, des jockeys et des entraîneurs. » Le galop italien ne sera plus le même et, pour une fois, tous les turfistes de la Péninsule sont obligés de dire : « Merci Sciur Salice. »