L’ÉLEVAGE DE PLAT FRANÇAIS DOIT GAGNER EN VISIBILITÉ
[LES GRANDS ENJEUX 2025] Par Adrien Cugnasse. Cela ressemble à un serpent de mer. Et pourtant, le sujet est plus que jamais d’actualité : il est nécessaire de réformer rapidement les règles d’attribution suffixes à l’échelle européenne. En 2024, six FR ont remporté des Grs1 en plat hors de France, contre quatre en 2023. Dans les faits, un nombre nettement plus important de lauréats à ce niveau est élevé en France, mais souvent avec les IRE ou GB accolés à leur nom. Or, cela représente huit Grs1 dans le monde en 2024 et même 13 en 2023 ! Pour beaucoup de gens, Ace Impact a été élevé en Irlande… Il ne se passe pas une semaine sans qu’un article dans la presse américaine ou australienne, ou qu’une publicité d’un organisme de promotion d’un pays étranger, attribue la réussite de ces mêmes chevaux à la filière irlandaise ou anglaise. Je suis persuadé que la majorité des grands entraîneurs ou propriétaires internationaux qui viennent acheter des chevaux à l’entraînement en Europe ne savent pas que certains IRE ou GB sont en fait élevés dans les campagnes françaises (et même pour certains éligibles à nos primes). Mise bout à bout, la récurrence de ces suffixes trompeurs dévalue l’image de l’élevage français à l’international. Il y a des réformes extrêmement coûteuses et difficiles. Celle-ci, sans demander d’investissement particulier, doit rétablir la véritable place de l’élevage de notre pays dans le concert des nations hippiques. Et cela n’a rien d’anecdotique. Car l’élevage français, qui est le fer de lance de la filière, a besoin de conquérir des parts de marché.Â
À l’échelle internationale, on assiste à un chamboulement des forces en présence. Il y a quelques années encore, on ne parlait pas ou peu d’Amo Racing, de Wathnan Racing, de Yulong (ou de ses différents avatars), de Repole Stables, de Resolute Racing… liste non exhaustive. Tous ces gens achètent des chevaux en France, que ce soit des yearlings ou des sujets à l’entraînement. Mais le grand challenge, c’est tout de même de les inciter à avoir des sujets en pension chez des entraîneurs français. On le sait, dans notre pays, la stabilisation d’un effectif à l’entraînement pour un propriétaire international vient souvent accompagner la création d’un élevage et/ou l’achat d’un haras (ce qui semble être moins le cas en Irlande, aux États-Unis ou en Angleterre). Outre la question de la visibilité évoquée au début de cet article, un autre grand challenge pour les années à venir est donc celui d’attirer et de stabiliser en France ce nouvel «argent» qui a fait flamber le marché public en 2024. Et c’est d’autant plus difficile si on attribue beaucoup de victoires françaises aux éleveurs anglo-irlandais…
Le chamboulement évoqué un peu plus haut se manifeste aussi par le fait que des pays satellites du galop européen – du pourtour méditerranéen à l’Europe Centrale – entrent dans la danse. Pour la première fois, un Libyen a acheté un cheval pour un million d’euros chez Arqana et les propriétaires de ce pays ont fait une percée remarquée sur le marché en 2024, dans des gammes de prix où on ne les attendait pas. À la vente de l’Arc, un propriétaire ukrainien a acheté un cheval à 290.000 € pour le confier à un entraîneur polonais. Il faut parvenir à convaincre ces gens de passer du statut d’acheteur en France à celui d’éleveur et de propriétaire dans notre pays. L’arrivée sur la scène française de la Yeguada Centurion, issue d’un pays satellite (l’Espagne), a donné un vrai coup de fouet à la compétitivité française ces dernières années (Big Rock, Blue Rose Cen, Ramatuelle…). La République tchèque, autre satellite du maillage hippique européen, nous a fourni le haras de Beaufay qui a cartonné aux ventes d’août tout en ayant sorti un gagnant de Coventry Stakes (Gr2).Â