ARTÉRITE VIRALE
LA VIE SANS VACCIN
Par Adeline Gombaud
ag@jourdegalop.com
À deux semaines du top-départ de la saison de monte, les étalonniers et les éleveurs font face, comme l’an passé et depuis avril 2023, à une rupture du vaccin Equip® Artervac. Dans cette hypothèse, la sous-commission sanitaire du livret généalogique (qui regroupe les vétérinaires de l’Ifce, de la F.N.C.H., de France Galop et de la Fédération des éleveurs du galop) a anticipé, et en juin, il a été décidé des aménagements du règlement sanitaire pour la saison de monte 2025. Même si la situation sanitaire concernant l’artérite virale en France est bonne, la surveillance reste constante.
Le protocole concernant les juments n’a pas été modifié. Un résultat sérologique négatif postérieur au 1er janvier est requis, sachant que la Fédération recommande que ce test soit effectué au plus proche de la saillie, si possible dans le mois qui précède la saillie. Si le résultat est positif, il convient de réaliser une seconde analyse au moins 14 jours après la première.
Si la jument était déjà séropositive, le résultat est comparé à celui des deux années précédentes : soit le titre (c’est-à-dire la présence des anticorps au virus de l’AVE dans le sang) est stable ou déclinant et la jument peut être présentée à l’étalon ; soit le titre est supérieur au précédent, et la saillie n’est pas possible. Il faut refaire une analyse 14 jours plus tard.
En revanche, pour les mâles reproducteurs, la situation se complique. Les étalons doivent, pour pouvoir saillir, être séronégatifs (séroneutralisation ou Elisa), ou en cas de séropositivité, présenter un contrôle virologique sur sperme négatif (par culture ou PCR). Dans l’objectif de garantir la sécurité sanitaire de l’élevage pur-sang et AQPS, France Galop se réserve par ailleurs le droit de procéder à un contrôle ADN aléatoire (pour vérifier que le sperme analysé est bien celui de l’étalon concerné).
Jusqu’à l’an dernier, une dérogation était accordée aux étalons exploités exclusivement en monte naturelle, du fait des difficultés de collecte de semence sur un mannequin. En effet, les étalons pur-sang ne sont pas habitués au mannequin (et tous les étalonniers pur-sang ne possèdent pas ce genre d’équipement), contrairement aux autres races où la monte artificielle est autorisée et pour lesquelles les étalons sont donc habitués à être collectés en montant sur un mannequin. Cette dérogation ne peut être reconduite en 2025, les autorités estimant que le risque sanitaire pris sur des étalons dont la dernière injection de vaccination remonte à plus de 18 mois – soit la très grande majorité – serait trop important…
GUILLAUME FORTIER : « UN PRINCIPE DE PRÉCAUTION FACE AUX RISQUES ENCOURUS »
Guillaume Fortier est le directeur général de Labéo, mais également le vétérinaire conseil de la Fédération des éleveurs du galop. Il est en première ligne pour ces questions sanitaires.
Jour de Galop. – Dans le cas des étalons, pourquoi ne distingue-t-on pas les animaux séropositifs parce que vaccinés, de ceux ayant été réellement en contact avec le virus ?
Guillaume Fortier. – Un étalon vacciné n’est pas obligatoirement séropositif, surtout si sa dernière vaccination remonte à plusieurs mois. Pour les animaux séropositifs, nous avons appliqué un principe de précaution qui se matérialise par ce contrôle virologique sur sperme, tout en étant conscients des contraintes que cela impose aux étalonniers. Il faut bien avoir conscience des risques potentiels d’une épizootie d’artérite virale. Avec des étalons qui, majoritairement, n’ont pas été vaccinés depuis plus de 18 mois, le risque était trop grand.
Pourquoi la réglementation européenne interdit-elle l’import de vaccins vivants, ce qui aurait pu être une solution de repli ?
Il existe une doctrine européenne, datant de 1997 et de la maladie de la fièvre aphteuse, interdisant l’utilisation de tout vaccin vivant pour les animaux. Equip Artervac ® était un vaccin inactivé. Mais Zoetis, son fabricant, va vraisemblablement abandonner définitivement sa production. Donc il ne reste, à l’échelon mondial, que l’Arvac ®, un vaccin vivant atténué, pour protéger nos animaux. Pour le moment, nous, Français, n’avons pas obtenu le droit de l’utiliser, alors que les Irlandais ont pu vacciner leurs étalons avec. Il y a donc une dissonance de la réglementation au niveau européen… Pour ces raisons, Loïc Malivet, président de la Fédération, a écrit à la ministre de l’Agriculture, et Guillaume de Saint-Seine va en faire de même. Nous avons deux arguments majeurs : le fait que l’Irlande a obtenu le droit d’utiliser ce vaccin, sans que l’on comprenne pourquoi et alors que l’arrêt de la fabrication d’Artervac ® n’était pas acquis, et le fait qu’il n’existe désormais aucun vaccin contre cette maladie autre qu’un vaccin vivant atténué. Si l’on raisonne selon le principe de la cascade, qui autorise les vétérinaires à utiliser un médicament hors A.M.M. si et seulement s’il n’existe aucun médicament sous A.M.M. pour traiter la pathologie concernée, il n’y a pas de raison que l’on nous refuse l’utilisation de l’Arvac ®.
QU’EST-CE QUE L’ARTÉRITE VIRALE ?
L’artérite virale équine (AVE) est une maladie respiratoire et de l’appareil reproducteur qui a provoqué une épizootie en Normandie durant l’été 2007. Du fait des conséquences potentielles de la maladie – avortements, mortalité chez les foals et portage à long terme du virus dans l’appareil génital des étalons –, son impact économique peut être important pour la filière équine. Cette maladie contagieuse est causée par un virus, dont il existe plusieurs souches avec des virulences variables. L’artérite virale équine est une maladie réglementée qui fait partie des dangers sanitaires de catégorie 2.
En cas de cheval positif, une déclaration doit être faite auprès de la D.D.P.P. (Direction départementale en charge de la protection des populations) par le laboratoire d’analyse, le vétérinaire sanitaire, le détenteur ou le propriétaire de l’équidé. Son diagnostic n’entraîne pas l’application de mesures de police sanitaire par l’État. La gestion des cas positifs est réalisée par les professionnels, en lien avec les laboratoires agréés et le vétérinaire sanitaire de la structure touchée, avec l’appui du Respe.