0,00 EUR

Votre panier est vide.

0,00 EUR

Votre panier est vide.

vendredi 3 janvier 2025

AccueilÉlevageÉTALONS FRANÇAIS, LE RETOUR DE LA TENUE ?

ÉTALONS FRANÇAIS, LE RETOUR DE LA TENUE ?

ÉTALONS FRANÇAIS, LE RETOUR DE LA TENUE ?

[La rédaction de JDG a sélectionné pour vous quelques-uns des meilleurs articles publiés en 2024. Épisode 10/10 : Le retour de la tenue ?] En 2024 en France, la moitié des étalons de plat qui ont atteint les 100 juments (neuf sur 18) sont des chevaux possédant de la tenue. L’année dernière, ils n’étaient que 33 % (cinq sur 15), tout comme en 2022 (cinq sur 15). Une situation à contre-courant de la tendance anglo-irlandaise.

La saison de monte 2024 est bel et bien terminée, avec son lot de surprises et de confirmations. Galiway (Galileo), avec 248 juments, a vraisemblablement battu le record de France. Si l’un de nos lecteurs se souvient d’un étalon français ayant atteint ou dépassé un tel nombre de juments, qu’il se manifeste ! De mémoire, le précédent détenteur du record appartenait à Cokoriko (Robin des Champs) qui avait sailli 234 poulinières en 2018.

Un gigantisme inédit

En Irlande, de tels chiffres n’émeuvent personne, mais chez nous, c’est quelque chose d’assez nouveau. Guy Pariente, le patron du haras de Colleville, analyse : « La demande a été tellement forte… que nous avons refusé environ 100 poulinières. Et nous avons déjà des précommandes de saillies pour l’année prochaine. »

Pour parvenir à 248 juments, Galiway a pu compter sur le soutien du haras de Colleville qui a mis en place une politique commerciale ambitieuse. Dans le Landerneau de l’élevage français, on parle beaucoup de la proportion de juments d’obstacle dans son carnet de bal 2024. Déterminer, simplement sur le papier, l’orientation d’une poulinière n’a rien de facile. Mais un rapide pointage montre que les « sauteuses » n’étaient pas plus d’une grosse trentaine, et ce en tenant compte de celles ayant aussi, déjà, produit un bon cheval de plat. Il faut dire que 30 000 €, cela représente un tarif jamais atteint dans le microcosme de l’obstacle où les stars saillissent (depuis peu) légèrement au-dessus de la barre des 20 000 €. Ce qui était inimaginable il n’y a ne serait-ce que dix ans.

Nous n’avons jamais vu le vrai Galiway

Le destin de Galiway – le cheval de course – est celui d’un être contrarié. Pour faire simple, on n’a jamais vu la réelle étendue de son potentiel. Si vous posez la question aux personnes qui travaillaient à l’époque chez André Fabre, ils vous diront que c’était le cheval de Jockey Club du maître cantilien cette année-là. Une information qu’il est bien sûr impossible de se faire confirmer une décennie plus tard. Dans les faits, André Fabre l’a présenté dans un Groupe en Angleterre dès sa deuxième sortie, à 2 ans, ce qu’il ne fait presque jamais. Et pour cause, on ne fait cela qu’avec un sujet qui sort très fortement du lot. Par la suite, il n’a tenté cette aventure qu’avec des 2 ans de la pointure d’Intello (gagnant de Listed à Newmarket pour sa troisième sortie) et Persian King (lauréat de Groupe à Newmarket en quatrième sortie). Malheureusement, la suite n’a pas été la même pour Galiway dont la carrière sportive a été perturbée. C’était donc vraisemblablement un très bon cheval qui n’a pas eu l’opportunité de montrer sa valeur en piste. Lauréat d’une Listed sur 1 800 m, il est difficile de connaître les limites de son éventuelle tenue, lui qui était issu de Galileo (Sadler’s Wells) et d’une mère lauréate de Groupe sur 1 600 m. Si on met de côté sa production d’obstacle, on remarquera que six de ses huit gagnants de Groupe en plat ont réalisé leur meilleure performance sur 2 000 m ou plus. Mais bien sûr, cela ne l’empêche pas d’avoir « sorti » Kenway (Prix La Rochette, Gr3) ou encore Showay (Prix Imprudence, Gr3).

Une question de tenue

Le consignor Jamie Railton a lancé un podcast mensuel très intéressant – « On the Coalface » –, où des personnalités du monde hippique s’y livrent comme jamais. C’est vraiment passionnant et le dernier épisode donne la parole à Philip Newton, le président de la version anglaise de la Fédération des éleveurs (la T.B.A.). Un passage y a particulièrement attiré mon attention. L’ancien grand patron explique : « Nous sommes très préoccupés par le manque de chevaux nés pour aller sur 2 000 m et plus. Ce serait honteux de perdre toute la tenue de notre population. En sachant que 25 % de l’ensemble de notre programme se court sur 2 000 m ou plus. Mais seulement 14 % des foals anglais sont issus d’un étalon ayant gagné sur (au moins) 2 000 m. » Le contexte anglais est bien sûr très différent du nôtre et la T.B.A. a mis en place un certain nombre de bonus et primes réservés aux jeunes chevaux de tenue. Si on regarde les épreuves black types sur 2 000 m et plus en Europe (de tous âges), on voit clairement deux groupes très distincts. Sur le continent, elles représentent près de la moitié du programme, avec 57 % des stakes en Allemagne et 49 % en France. De l’autre côté de la Manche, on tombe à 37 % en Angleterre et seulement 34 % en Irlande.

La France à contre-courant

Cette année, les chiffres français sont éloquents et à contre-courant de ce qui se passe en Angleterre ou en Irlande : sur les 18 étalons de plat (ou dual purpose) ayant sailli 100 juments ou plus chez nous, neuf ont gagné sur 2 000 m ou au-delà. Vraisemblablement, en France, la tenue ne fait pas peur, y compris chez les débutants, à l’image d’Ace Impact (Cracksman), Vadeni (Churchill), Onesto (Frankel), Mishriff (Make Believe) et Bay Bridge (New Bay). Il faut également mentionner certains de leurs aînés qui, eux aussi, ont eu une liste de saillies à trois chiffres (Sealiway, Zarak et Intello). Enfin Persian King (Kingman) n’a certes pas gagné sur 2 000 m, mais le fait d’être monté sur le podium de l’Arc et du Jockey Club apporte des garanties de tenue.

Neuf autres sires de ce « club des 100 » n’ont pas brillé sur 2 000 m ou plus. Mais il y a de fortes suspicions de tenue chez deux d’entre eux. C’est le cas de Galiway, que nous avons évoqué plus haut, mais aussi de Seabhac (Scat Daddy). Le jeune sire du haras du Taillis n’était lui-même pas un pur précoce : il a débuté à l’été de ses 2 ans sur 1 700 m, courant trois fois sur cette distance avant de s’accidenter. Or 1 700 m, c’est déjà un signe de tenue pour un 2 ans, surtout quand on a un père de mère (Curlin) et un oncle (Afleet Alex) qui tenaient « vraiment ». Sa production confirme ces hypothèses et, déjà, la moitié de ses gagnants se sont imposés sur 2 000 m ou plus, un « créneau » où son taux de gagnants par partant est supérieur de 15 % à celui de ses produits sur « plus court ».

Parmi les neuf sires n’ayant pas gagné sur 2 000 m, l’on retrouve aussi trois étalons dont la distance moyenne de victoire des produits gravite autour du mile (et qui ne sont donc pas de purs étalons de vitesse) comme City Light (1 664 m), Siyouni (1 627 m) ou encore Muhaarar (1 680 m). De même, un cheval comme Anodin (Anabaa) était un miler, mais 60 % de ses lauréats de stakes ont décroché leur fait d’armes sur 2 000 m ou plus.

Sur les 18 sires de notre short list, il reste donc le débutant Erevann (Siyouni), qui a brillé sur le mile, mais aussi Hello Youmzain (Kodiac), un sprinter qui n’a pour l’instant que des 2 ans en piste. Et Goken (Kendargent) qui est un vrai vecteur de vitesse, sa production ayant une distance moyenne de victoire de 1 400 m.

Les limites du débat

Le débat sur le manque de tenue dans le parc anglo-irlandais en dehors des élites (Frankel, Sea the Stars) est un peu un marronnier de la presse hippique en langue anglaise. Et à titre personnel, je trouve regrettable qu’il soit trop souvent traité de manière caricaturale. Il n’y a pas d’un côté les cupides éleveurs commerciaux à la botte d’un marché totalement aveugle, et de l’autre de vertueux éleveurs-propriétaires qui défendent valeureusement le classicisme.

Ce glissement vers la vitesse/précocité est venu avec l’explosion des coûts d’entraînement et la présence toujours plus forte des mastodontes du secteur sur les distances intermédiaires (de Coolmore à Godolphin en passant par Juddmonte). Le problème, c’est que ce qui devait être une stratégie de diversification est devenu la norme pour toute une partie du marché anglo-irlandais. Si les allocations de leur pays (et les primes) le permettaient, il y a fort à parier que les éleveurs commerciaux anglais ou irlandais seraient restés dans un giron plus classique comme les générations précédentes. Comme en France donc.

De manière tout à fait subjective, j’ai la faiblesse de penser que c’est la diversité – dans le programme et chez les reproducteurs – qui fait la force de l’élevage européen. Les très bons chevaux de distance intermédiaire ou de tenue ont souvent un apport de vitesse dans les premières générations de leur pedigree. Et inversement, beaucoup de grands sprinters ont un peu de tenue dans leur papier. Philip Newton, dans son interview, laisse entendre qu’outre-Manche, tout le monde veut les mêmes yearlings « vite et précoces » qui ont donc tendance à être surpayés par rapport à leurs futures opportunités en course. Et surtout par rapport à leur valorisation sur le marché des chevaux à l’entraînement : une placée de Listed sur 2 000 m a une valeur (toutes choses égales par ailleurs) très largement supérieure à celle d’une placée d’une épreuve de même niveau sur 1 000 m. Philip Newton analyse : « Le programme sur les distances intermédiaires offre de réelles opportunités : 14 % de chaque génération a 25 % du programme à sa disposition. Le pool de compétiteurs est bien moins fourni. Je suis persuadé que la demande de yearlings pouvant potentiellement tenir 2 000 m ou plus va augmenter à nouveau. Ceux qui auront été capables de pressentir cette tendance seront vraisemblablement récompensés aux ventes dans le futur. » De ce point de vue-là, l’élevage français n’a donc pas fait fausse route en 2024. Reste à savoir si les acheteurs de 2026 seront du même avis ! Ce que Philip Newton ne dit pas, c’est si son analyse s’applique à toutes les strates du marché : ce pari des étalons de distances intermédiaires s’appliquera-t-il aussi bien pour le haut de gamme que pour le cÅ“ur du marché ? Là est la question !

Les étonnantes prédictions de Bryan Mayoh

Cet ancien chercheur de l’Université d’Oxford est aussi le dernier éleveur anglais à avoir gagné la Gold Cup de Cheltenham (Sizing John en 2017) dans un sport où les Irlandais et Français de naissance règnent en maître. Féru de statistiques et désormais à la retraite, Bryan Mayoh a décidé de pousser la base de données du Racing Post dans ses retranchements ! À la fin du mois de janvier 2020, il a d’ailleurs publié un article très ambitieux dans le quotidien britannique : « Est-il réellement possible de prédire quel étalon va réussir en plat ? » Tous les éleveurs cherchent à deviner, parmi les nombreux débutants qui débarquent tous les ans au haras en Europe, lesquels vont devenir les futurs Galileo (Sadler’s Wells) et Dubawi (Dubai Millennium). Mais comme tout le monde le sait, il y a beaucoup d’appelés, mais peu d’élus… La question posée par Bryan Mayoh est la suivante : « Existe-t-il des points communs entre ces nouveaux étalons qui permettent de détecter plus tôt les futurs bons reproducteurs ? » Son étude se base sur les ratings de la production de 505 sires ayant fait la monte outre-Manche, et ayant eu 50 partants ou plus. Ne sont pris en compte que les chevaux ayant eu au moins trois générations en piste en 2019. Personne ne sera surpris de trouver dans le top 5 % de son classement – par les ratings de leur descendance – les grands noms du stud-book (Frankel, Galileo, Dubawi, Sea the Stars, Sadler’s Wells, Danehill, Dancing Brave, Darshaan, Machiavellian, Rainbow Quest, Montjeu, Shamardal, Pivotal, Lope de Vega, New Approach, Invincible Spirit…). Comme il le démontre dans le tableau ci-dessous, Bryan Mayoh annonce la chose suivante : les chevaux de distance intermédiaire obtiennent le meilleur taux de réussite parmi l’élite des reproducteurs, suivi par les milers et enfin les sprinters.

PROFIL DES ÉTALONS AYANT RÉUSSI AU HARAS EN ANGLETERRE ET EN IRLANDE

Meilleure distance de performance de l’étalon

1.000 m/1.200 m

1.400 m/1.800 m

2.000 m ou plus

Nombre total d’étalons

163

267

125

Nombre d’étalons dans le top 5 %

5 (3,1 %)

10 (3,7 %)

12 (9,6 %)

Nombre d’étalons dans le top 10 %

9 (5,5 %)

21 (7,9 %)

25 (20 %)

Nombre d’étalons dans le top 25 %

26 (16 %)

58 (21,7 %)

54 (43,2 %)

Mais au final, qu’est-ce qui est le plus déterminant ?

Bryan Mayoh va ensuite plus loin et pose une deuxième question : « Quel est l’impact de la réussite en course sur la performance au haras ? » Sans surprise, les chevaux ayant un rating Timeform de 130 ou plus ont sept fois plus de chance de réussir au haras (et d’intégrer le top 2 % des étalons) que ceux ayant un rating compris entre 125 et 129. Et 12 fois plus que ceux ayant décroché un rating entre 120 et 124. Enfin Bryan Mayoh pose une troisième question : « Existe-t-il des facteurs statistiquement plus efficaces que la distance de performance pour trouver un futur top-sire ? » Et selon ses calculs, les deux éléments les plus importants sont dans l’ordre : le rating de l’étalon, suivi par le fait que son père soit lui-même un grand reproducteur… Sur le papier, cela a donc l’air très simple !

Etreham fait la course en tête

Avec 1.056 juments en 2024 (en tenant compte de celles saillies au haras de la Tuilerie), c’est Etreham qui a dominé cette année du côté des haras, mais Cercy n’est pas très loin (une centaine de poulinières en moins). Au final, six haras ont atteint ou dépassé la barre des 500 saillies (Haie Neuve, Hêtraie, Le Lion, Bonneval…).

Un détail est vraiment remarquable : en France, 16 haras différents ont au moins un étalon avec 100 saillies ou plus en 2024. C’est vraiment beaucoup à l’échelle de notre parc. Mieux encore, 14 sur 16 sont des TPE et/ou des entités qui ont vu le jour il y a moins de quinze années. En France, il y a encore de la place sur le marché de l’étalonnage. En témoigne la réussite des nouveaux venus comme le haras de Beaumont qui a réalisé une superbe saison avec Ace Impact (182), Sealiway (157) et Intello (112), ou encore le haras de Montfort et Préaux-Sumbe avec Mishriff (112) et Angel Bleu (95).

VOUS AIMEREZ AUSSI

Les plus populaires

LUCKY PLACE ENGRANGE

TUZ CONSERVE SON TITRE

MEYDAN (AE), VENDREDI

KORRAL RECTIFIE LE TIR