CRAVACHE : LE SENS DE L’HISTOIRE
Le Trot a pris un tournant historique mercredi en annonçant que les coups de cravache seraient bannis à compter du 1er avril 2025. La cravache devient un élément de sécurité, servant uniquement à donner un signal au cheval par un mouvement de poignet. Cette modification du code fait suite aux décisions prises lors de l’AG de l’UET (Union européenne du trot) en juillet 2024. Présidente de l’UET, Marjaana Alaviuhkola avait alors déclaré : « C’est une décision qui fera date dans l’histoire de l’UET. Elle marque une nouvelle ère pour l’image du trot et les questions de bien-être animal. Les professionnels européens montrent que le respect du trotteur est une priorité dans leurs décisions. Je me réjouis que le trot européen montre la voie avec ces nouvelles règles à toutes les instances internationales des courses, que ce soit au trot ou au galop. Le bien-être équin a toujours été le moteur de mon engagement à la présidence de l’UET depuis mon élection. »
Nous avons demandé à Pierre Vercruysse, l’un des drivers français les plus titrés et qui possède une grande expérience internationale, son avis sur cette évolution : « Nous allons nous adapter. Dans certains pays nordiques, la cravache est déjà interdite. Pour moi, elle reste indispensable comme outil de sécurité. Un cheval qui fait pile, qui perd son attention… Nous avons besoin de la cravache non pas pour punir le cheval, mais pour le remettre de l’avant. Chaque année, le code a évolué en réduisant le nombre de coups autorisés, la façon de les porter… C’est le sens de l’histoire que la cravache ne conserve plus que son rôle sécuritaire. De toute façon, l’apparition du sulky yankee avait déjà commencé à changer la façon dont les drivers se servent de la cravache. Avec ce type d’équipement, nous sommes beaucoup plus loin du cheval et on ne peut donc plus guère toucher que le bout de sa croupe. »
À quand la même règle au galop ?
Édouard de Rothschild a toujours « poussé » pour la restriction de l’usage de la cravache. Finalement, le Trot a pris de vitesse le galop, et nous avons demandé à l’ancien président de France Galop sa réaction : « D’un point de vue sociétal, il est évident que la démarche de la SETF est la bonne. Cela fait plusieurs années que je milite pour l’usage de la cravache avec un objectif directionnel, sans que le jockey ne lâche sa rêne. En termes d’image cela aurait du sens, mais l’homme de cheval que je suis est plus nuancé. C’est pourquoi, même si notre discipline du galop est soumise à plus de coordination internationale que le trot, je ne vois pas d’inconvénient à ce que la France soit précurseur sur le sujet. »
Christophe Soumillon, qui a eu maintes fois l’occasion de driver, explique : « Lorsque l’on sollicite un cheval à l’épaule, le fait de lâcher la rêne ou pas ne change pas grand-chose mais pour la sollicitation qui a lieu sur l’arrière-main, cela est différent. Cette manière de stimuler les chevaux est utile pour un cheval froid ou pour régler des problématiques directionnelles, voire pour pallier certaines réactions des chevaux. »
Fils de Bruno Marie, entraîneur au trot, Benjamin Marie se met lui aussi régulièrement au sulky dans les courses d’amateurs. Il ajoute : « Au trot, lorsqu’un cheval se met de travers, il n’est plus dans les bonnes allures et il peut être disqualifié pour ce motif. C’est à ce moment-là que la cravache est très utile. Concernant la sécurité dans les pelotons au galop, la cravache à un rôle très important, surtout dans les handicaps ou même avec les jeunes chevaux qui sont parfois en manque de repères. »