Les courses, un sport de haut niveau
Pas de regrets, que des bons souvenirs et l’amour pour les chevaux et son métier. C’est du pur Pascal Bary qui adore son sport : « Oui, il faut que les courses redeviennent un sport de haut niveau, c’est primordial pour redonner aux gens l’envie de revenir sur les hippodromes. Au fil des années, beaucoup de choses ont changé : c’est un travers de vouloir chercher la recette quoi qu’il en coûte. Une course à six partants de haut niveau est plus intéressante qu’un petit handicap et il faut travailler sur ce sujet. Il est très important d’encourager les propriétaires à investir dans les bons chevaux et le seul moyen d’y arriver, c’est de travailler sur la répartition des allocations au profit des meilleurs. Ce n’est pas évident puisqu’acheter les bons coûte cher et les garder dans le contexte d’un marché de plus en plus international, avec des acheteurs forts de tous les continents, c’est très dur. »
Le rôle des propriétaires-éleveurs
Pascal Bary a bâti sa carrière en travaillant beaucoup avec des propriétaires-éleveurs qui se sont montrés très fidèles : « Pour un entraîneur c’est le scénario parfait. On a l’avantage d’avoir entraîné les mères, les grands-mères et de connaître les souches. J’ai travaillé pour des grands éleveurs comme les Niarchos, Juddmonte et beaucoup d’autres, j’ai eu des propriétaires qui m’ont toujours fait confiance comme Jean-Louis Bouchard depuis mes débuts. Il est dommage d’avoir rencontré trop tard dans ma carrière Al Shira’Aa, une opération courses-élevage qui va grandir et qui travaille comme je l’aime, c’est-à -dire avec l’objectif de sortir de bons chevaux pour gagner les grandes courses. »
Monsieur Jockey Club aussi sur 2.100m
L’un des grands changements dans le programme de sélection français est le raccourcissement du Prix du Jockey Club. Pascal Bary a gagné cinq fois le classique quand il se courait sur 2.400m et une fois sur 2.100m, en 2018 avec Study of Man (Deep Impact) : « J’ai aussi gagné la version raccourcie. Du point de vue de l’élevage et de la sélection, le Prix du Jockey Club a gagné en prestige sur le marché. Il est devenu plus difficile de le gagner. Quand il était sur 2.400m, c’était une course plus simple à préparer. Il fallait le bon cheval, beaucoup de travail et un peu de talent de la part de l’entraîneur. Les classiques sont toujours l’objectif d’un entraîneur et peu importe la distance. J’ai beaucoup aimé Study of Man et je suis content qu’il soit en train de faire une carrière d’étalon de bon niveau. »
Divine Proportions, la reine du cœur
La reine du cœur de Pascal Bary est Divine Proportions (Kingmambo) : « Elle était la classe pure. Ce qu’elle a fait, ses cinq Grs1 de 1.200m à 2.100m à 3ans, c’est exceptionnel. Si je dois choisir une grande course gagnée par mes chevaux, je vous dirai sans doute le Prix de Diane de Divine Proportions et c’est sans rien enlever aux autres champions que j’ai eu la chance d’entraîner. »
Les voyages et les rencontres
Les chevaux de Pascal Bary ont gagné partout dans le monde. Les trois Breeders’ Cups de Miss Alleged (Alleged), Domedriver (Indian Ridge) et Six Perfections (Celtic Swing) ainsi que la première Dubai World Cup à dix millions d’allocations gagnée avec le brésilien Gloria de Campeao (Impression), les 1.000 Guinées de Natagora (Divine Light). Que de bons souvenirs : « La formule est toujours la même : des bons chevaux et des propriétaires ambitieux. Le propriétaire de Gloria de Campeao et Natagora, le Suédois Stefan Friborg, a été une rencontre importante dans ma carrière mais j’ai eu le plaisir de travailler avec beaucoup d’autres étrangers comme Franca Vittadini, que j’avais connue au Canada quand nous avions des pouliches dans les E.P. Taylor (Gr1). Elle m’a confié une très bonne femelle comme Field of Hope qui a gagné le Prix de la Forêt (Gr1) et s’est classée deuxième dans le Hong Kong Mile ainsi que d’autres qui ont fait carrière dans les Groupes. J’ai eu des clients et amis italiens comme Michele Solbiati qui a encore une pouliche à l’écurie et le regretté Franco Polidori. C’est l’un des plaisirs de ce métier, rencontrer des gens qui vous apportent quelque chose et partagent avec vous le plaisir de gagner des bonnes courses. »
Un métier qui a beaucoup évolué
Le travail d’entraîneur a beaucoup changé en très peu de temps et dans toutes les facettes : « Il y a une douzaine d’années, les chevaux avaient un seul propriétaire et c’était plus facile à gérer. Le rapport était personnel et très direct alors que maintenant, on a beaucoup d’associations et il faut s’adapter à ce scénario. C’est un peu le même problème avec les jockeys : quand on avait le jockey à l’écurie, il était plus simple de programmer la campagne d’un cheval. »
Et les chevaux aussi
La technique de l’entraînement et la manière de gérer les chevaux n’est plus la même. Le pur-sang est aussi un animal différent : « Je trouve que les chevaux sont devenus un peu plus fragiles qu’avant mais il ne s’agit pas d’un problème d’élevage. C’est plutôt la manière de les exploiter. Autrefois les 2ans arrivaient plus tôt à l’écurie, après les ventes, et ils étaient au travail de bonne heure. Ils étaient plus endurcis que maintenant mais c’est le résultat du programme. La saison s’étale désormais sur douze mois et il y a les courses tous les jours. Il est logique pour un entraîneur de s’appliquer sur les chevaux qui doivent courir le lendemain plutôt que de façonner des juniors qui iront aux courses six mois plus tard. »
L’avenir des courses
Les courses vont encore évoluer dans les années qui viennent et il est intéressant de découvrir avec le jeune retraité Pascal Bary comment sera notre sport d’ici dix ans : « Il est sûr et certain que les courses vont beaucoup évoluer et je répète que ma décision d’arrêter n’est pas liée à cette évolution. Je pense que l’un des mots-clés sera la défense du cheval, le bien-être animal. C’est un grand défi pour tout le monde des courses et il faudra se pencher sur le sujet tous ensemble pour trouver un équilibre. L’autre grand point, c’est de faire retrouver au public et aux propriétaires le goût du sport au plus haut niveau. D’autres sports comme la Formule 1 ont connu des moments difficiles et ils sont sortis avec les bonnes solutions. J’aimerais bien dans dix ans que ce sport magnifique, qui m’a permis d’exercer un métier fabuleux, retrouve sa place. » Â