PLAT ET OBSTACLE
LA RECETTE DU CHAMPION ÉCLECTIQUE
Par Christopher Galmiche
cg@jourdegalop.com
Il y a soixante-dix sept ans, Le Paillon remportait la Grande Course de Haies d’Auteuil et le Prix de l’Arc de Triomphe (Grs1) durant une même saison. Le contexte particulier de l’après-guerre avait sans doute été un facteur important dans ce doublé très atypique. Par la suite, il y a eu des stayers qui ont été capables de surfer sur les deux tableaux dans les Groupes. Nous avons demandé les secrets de préparation pour courir un même cheval au meilleur niveau, en plat et en obstacle, à deux professionnels qui ont connu ce cas de figure : François Doumen et Jean Lesbordes.
François Doumen : « C’est une réorganisation »
François Doumen a connu la réussite au plus haut niveau, en plat et en obstacle, en France comme à l’étranger. Pour cela, il faut évidemment les chevaux, mais aussi les propriétaires et évidemment le personnel qui puisse travailler en plat d’une part et en obstacle d’autre part. « Dans les temps modernes, il y a peu d’entraîneurs qui font à la fois le plat et l’obstacle, même chez les meilleurs. C’est étonnant ! Il faut prendre en compte aussi le choix des propriétaires. Ce n’est pas facile de faire changer de politique certains propriétaires. Pour l’entraîneur, c’est une réorganisation car il faut du personnel pour monter les chevaux d’obstacle. On ne peut pas mettre des cavaliers d’entraînement ayant l’habitude des chevaux de plat sur The Fellow ou Baracouda. L’obstacle est un peu une spécialité de cavalier si l’on veut faire du bon travail. Il faut deux équipes, plus spécialisées sur son domaine. »
Kasbah Bliss, le dernier
François Doumen a eu sous sa responsabilité le dernier cheval capable de se distinguer à haut niveau en plat et en obstacle avec Kasbah Bliss (Kahyasi). Valeur 35,5 en plat en début de carrière, il a enlevé le Prix Finot, puis l’Adonis Hurdle (Gr2), trois Grs3 à Auteuil, deux Rendlesham Hurdle (Gr2) en Angleterre, avant de terminer deuxième et quatrième du World Hurdle (Gr1) à Cheltenham, puis d’enlever le Qatar Prix du Cadran (Gr1) entre autres. « Kasbah Bliss était dans cette configuration du cheval qui a performé dans les deux disciplines. Il faut aussi ajouter Quel Senor [lauréat du Prix du Prince d’Orange et plus tard de la Breeders’ Cup Steeple-Chase, ndlr]. La plupart de mes grands champions d’obstacle étaient AQPS donc peu enclins à faire une carrière en plat, même si j’ai eu Umbrage (Astarabad), qui a eu le record de gains en plat à l’époque pour une AQPS. En même temps que j’échange avec vous, je retrouve des lettres que j’avais reçues d’Angleterre, de gens inconnus, qui me demandaient de courir la Gold Cup d’Ascot (Gr1) avec Baracouda [vainqueur de deux World Hurdle et quatre Long Walk Hurdle, ndlr]. Pour eux, cela paraissait être un défi abordable. C’est d’ailleurs ce qu’est en train de nous prouver Willie Mullins ! Baracouda était un peu compliqué et j’étais content qu’il atteigne les Groupes avec peu de partants car il fallait toujours le décontracter à l’arrière-garde. Le remettre en plat l’aurait rendu plus tendu. Si on le mettait dans le peloton, ça changeait tout. J’ai eu aussi Laveron qui a brillé en plat avant de devenir
...