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jeudi 14 novembre 2024

AccueilCoursesPhilip Prévost-Baratte : « À quand un agrément pour les pré-entraîneurs ? »

Philip Prévost-Baratte : « À quand un agrément pour les pré-entraîneurs ? »

Philip Prévost-Baratte : « À quand un agrément pour les pré-entraîneurs ? »

Près de 300 poulains passent chaque année dans les mains de l’équipe Prévost-Baratte. Philip et Julie, les maîtres des lieux, ont créé cette structure de débourrage-préentraînement il y a vingt ans, après une solide expérience dans l’entraînement, en France comme à l’étranger. En deux décennies, ils ont vu leur métier évoluer, positivement comme négativement. Et militent aujourd’hui pour plus d’éthique dans la filière…

Jour de Galop. – Comment décririez-vous à un néophyte votre métier de débourreur-pré-entraîneur ?

Philip et Julie Prévost-Baratte. – Pas en utilisant ce terme-là ! Nous préférons parler d’éducateurs de chevaux. Tout le sel de notre métier, c’est d’établir une relation entre un animal qui n’a rien demandé et un homme qui sait ce qu’il attend de lui. Nous sommes là pour créer une connexion, inculquer au poulain des bases solides afin qu’il puisse exprimer au mieux son potentiel physique et mental lors de sa carrière sportive. Pour cela, nous pensons que le bon sens est fondamental. Il est important de préciser que le pré-entraîneur n’est pas un entraîneur : nous sommes dans l’éducation, le travail de fond, afin de transmettre à l’entraîneur un poulain apte à encaisser le travail d’entraînement. Il n’est pas logique qu’en sortant du pré-entraînement, un poulain doive être ralenti dans son travail, alors qu’au contraire, c’est le moment où il doit accélérer !

Vous allez bientôt fêter vos vingt années d’installation. Quel est l’aspect de votre métier qui a le plus évolué ?

Nous n’allons pas être originaux mais je dirais le personnel. Nous avons de plus en plus de mal à trouver des personnes passionnées par le travail du jeune cheval. Mais nous sommes en partie responsables de cet état de fait ! Trop longtemps, le personnel a été mal payé, mal considéré. Il faut redonner de l’attractivité aux métiers des courses. Et je pense qu’outre l’amélioration des conditions de travail, cela passe aussi par la communication avec le public. Depuis plusieurs années, nous ouvrons les portes de notre écurie à l’occasion des Equidays. En tant que professionnels des courses, nous avons une responsabilité envers l’image que nous véhiculons au grand public. Aucun cheval n’est fait pour passer 23h/24 dans son box. Ils doivent pouvoir aller au paddock. Pré-entraîneur, entraîneur : nous devons travailler pour l’intérêt du cheval. Il n’est pas normal qu’un cheval reste à l’entraînement douze mois sans phase de repos. Avec Bertrand Le Métayer notamment, nous avons mis en place un système de stages, où le poulain alterne des phases de pré-entraînement où il peut aller au paddock, des phases d’entraînement, et des phases de repos. C’est ainsi qu’un cheval va réellement progresser. Tous les entraîneurs n’adhèrent pas à cette méthode. J’imagine qu’ils craignent que le cheval ne revienne pas dans leur écurie ! Pourtant, il nous semble que c’est en fonctionnant ainsi, en pensant au cheval et donc à son propriétaire, que l’on crée une relation de confiance et donc de fidélité.

Justement, comment les relations entre les pré-entraîneurs et les entraîneurs ont-elles évolué ?

Quand l’activité de débourrage-pré-entraînement a été créée en France, sous l’impulsion de Yann Poirier qui a fait un travail formidable, nous n’étions pas vraiment considérés… Pas assez bons pour devenir entraîneur, trop vieux pour être jockey ! Les choses ont évolué évidemment, mais les chevaux, et les propriétaires, gagneraient à une meilleure synergie entre les pré-entraîneurs et les entraîneurs. Réfléchir ensemble quand un problème arrive sans se rejeter la faute, mais pour comprendre d’où il vient et comment le résoudre. Nous avons eu la chance, quand nous nous sommes installés, d’avoir rapidement la confiance de Nicolas Clément. Travailler avec lui nous a fait progresser, car il nous a challengés. C’est dans ce genre de collaboration intelligente que l’on fournit le meilleur travail, c’est-à-dire celui qui sert le cheval.

De façon plus globale, nous déplorons souvent que notre filière ne soit pas assez soudée, alors même que nous avons des combats à défendre ensemble, à commencer par celui de l’image ! Une plus grande éthique en notre sein serait une vraie avancée pour notre milieu.

Les pré-entraîneurs n’ont pas besoin de licence ou d’agrément pour s’installer. Est-ce normal ?

Non ! Nous avons tout à gagner à mieux encadrer notre profession. Ce vide juridique a permis à des gens comme Andrea Marcialis de s’installer comme pré-entraîneur. Souhaitons-nous voir dans nos rangs ce genre de personnages ? Je ne le crois pas ! De façon plus générale, je ne pense pas qu’on puisse s’improviser débourreur-pré-entraîneur. Il faut des connaissances techniques, des capacités de chef d’entreprise, de la volonté aussi. Prenons exemple sur des personnes comme Éric Ventrou, qui a le courage de déménager en Normandie après avoir commencé son activité en Charente, ou ma responsable, Clarisse, une personne clé dans le bon fonctionnement de l’écurie qui, nous l’espérons, volera de ses propres ailes le temps voulu.

Les installations sont aussi primordiales. Les personnes sérieuses – et il y en a ! – font notamment très attention à la qualité du sol de leur piste. Il ne faut pas oublier que nous travaillons avec des animaux en croissance. Tout cela, en plus d’un personnel compétent, a un prix. Il n’est pas logique que lorsqu’un jeune s’installe, la première chose qu’on lui demande, c’est son tarif ! Il faut accepter le payer le juste prix pour avoir un service de qualité. Nous avons peu ou prou les mêmes charges qu’un entraîneur, pourquoi devrions-nous êtres deux fois moins cher ?

Les coûts très bas pratiqués par certains pour attirer le client, c’est un nivellement par le bas de notre activité, et qui met encore en avant le besoin d’éducation des professionnels afin qu’ils sachent se vendre correctement. Oui, il y a sûrement un tri à faire dans ce domaine. Et l’agrément pourrait créer un premier filtre.

Votre activité est par définition saisonnière. Comment la rendre rentable toute l’année ?

Comme expliqué, nous avons la chance de travailler avec des professionnels qui nous font confiance et qui n’hésite pas à nous renvoyer les poulains quand ils ont besoin d’un break. Pas d’un break total, mais d’un travail léger et de sorties au paddock. Il y a aussi la préparation aux ventes, notamment aux breeze ups. Nous présentons chaque année plusieurs 2ans à Arqana, Baden et Osarus… Mais en gardant toujours la même philosophie : l’intérêt du cheval. Nous ne pouvons pas cautionner ce que l’on peut parfois voir chez des confrères français ou étrangers.

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