La montée en puissance d’Avatara
La casaque rouge et bleu d’Avatara est apparue sur les programmes français en 2022, avec l’arrivée sur les pistes de la première génération de l’étalon Dschingis Secret. C’est par amour pour ce cheval lauréat de Gr1 que Bernd Dietel, homme d’affaires allemand, a décidé d’investir dans l’élevage et dans les courses, principalement en France. Nicole Huffer, qui travaille avec lui depuis plus de 20 ans, est la directrice d’Avatara S.A.. Elle s’occupe de l’écurie et de l’élevage depuis 2021.
Par Adeline Gombaud
ag@jourdegalop.com
Jour de Galop. – D’où vient la passion de Bernd Dietel pour les courses ?
Nicole Huffer. – Bernd Dietel est un passionné et un visionnaire : il a ses couleurs depuis trente ans. Il a eu la chance d’avoir de très bons chevaux sous ses couleurs en Allemagne, notamment un placé de Derby allemand. Dschingis Secret a été, entre autres, troisième du Derby allemand (Gr1), vainqueur du Longines Grosser Preis de Berlin (Gr1), vainqueur du Qatar Prix Foy (Gr2) à Chantilly, deux fois lauréat du Grosser-Hansa Preis (Gr2) à Hambourg et partant dans l’Arc de Triomphe (Gr1). Il a été le cheval de l’année 2017 en Allemagne. Bernd Dietel était associé sur la propriété de Dschingis Secret avec Horst Pudwill et, quand le cheval est entré au haras en France, il a décidé de le soutenir en investissant dans de bonnes juments. Il nous a semblé que la Normandie était l’endroit idéal pour baser cet élevage, entre la qualité des terres, l’accessibilité, le système français… Désormais, Dschingis Secret est basé à Montaigu, où nous avons aussi une vingtaine de juments. C’est Nicolas de Chambure qui nous a mis en relation avec Aliette Forien, Sybille Gibson et leur équipe. Nous sommes ravis de cette collaboration et les premiers “Avatara” nés à Montaigu viennent de prendre 2ans. Nous pouvons nous appuyer sur leur grand savoir et leur expérience, la qualité de leurs équipes et de leurs terres… C’est une bénédiction de pouvoir compter sur eux.
Vous avez réalisé une excellente année 2023, aussi bien en plat qu’en obstacle. Quels sont vos objectifs ?
Nous souhaitons vraiment nous concentrer sur la qualité plutôt que la quantité. Nous avons enregistré nos premiers gagnants black types de Dschingis Secret et c’est l’orientation que nous souhaitons donner à notre élevage. Pour cette raison, nous avons vendu certaines juments qui n’avaient pas atteint le standard requis et acheté des juments de haut niveau, comme nous l’avons fait avec la gagnante de Gr1 Donjah en 2022. Entre les chevaux d’élevage et ceux à l’entraînement, nous aurons cette année une centaine de sujets. Nous avons quelques chevaux à l’entraînement en Allemagne, pour des raisons essentiellement sentimentales : Andreas Suborics a monté en course pour Bernd Dietel et aujourd’hui, nous travaillons avec succès avec lui en tant qu’entraîneur. Nous avons également un cheval d’obstacle en République tchèque. Mais la majorité de nos effectifs est basée en France, chez Yann Barberot, Anastasia Wattel et Matthieu Brasme pour le plat, et Gabriel Leenders pour l’obstacle. Yann Barberot, qui a entraîné Sea the Lady, est notre entraîneur numéro un. Nous avons vraiment une relation spéciale avec lui : c’est un homme qui sait “lire les chevaux”, et son expertise est vraiment un plus pour nous. La bonne collaboration et l’échange avec les entraîneurs sont très importants pour nous. Ils sont des partenaires parfaits et font partie de l’équipe qui nous aide à améliorer nos résultats.
Vous semblez très attachée à la notion d’équipe ?
Nous sommes très attachés à nos chevaux et aux personnes qui en prennent soin ! Il est important pour nous que toutes les parties communiquent bien ensemble. Nous sommes régulièrement au haras et au contact des entraîneurs afin de suivre l’évolution des chevaux, mais nous n’y sommes pas tous les jours. C’est pour cela qu’il est important de recevoir des nouvelles, des photos, des vidéos… Nous écoutons beaucoup les professionnels qui ont en charge nos chevaux car ce sont des indications importantes pour l’élevage. Toutes les données sont consignées dans un logiciel – Horse Manager – pour avoir une vraie traçabilité. Bernd et moi-même avons une vision “business” de l’activité cheval, tout en entretenant un lien fort et passionné avec les chevaux.
Dschingis Secret a donné l’an passé des black types en plat, mais aussi en obstacle. Est-ce une surprise ?
Pas vraiment, car il ne faut pas oublier qu’il s’agit d’un fils de Soldier Hollow, qui a déjà prouvé, via plusieurs de ses fils, transmettre une aptitude à l’obstacle. Dschingis Secret a vraiment tout pour faire un étalon polyvalent.
Allez-vous diversifier les étalons auxquels vous croisez vos juments ?
Oui, car nous avons aussi au haras plusieurs filles de Soldier Hollow. Sea the Lady, l’une de nos meilleures élèves jusqu’à présent, est une fille de Sea the Moon. Sa mère, Blumenfee (Soldier Hollow), a une 2ans par Elarqam et un yearling de Persian King. Cette année, nous allons envoyer des juments à Sea the Moon, Ghaiyyath, Modern Games, Native Trail…
Êtes-vous favorable à l’association avec d’autres éleveurs sur certaines femelles ?
Nous le faisons déjà . Nous étions associés avec le haras d’Étreham sur Sea the Lady que nous avons vendue en décembre dernier chez Arqana.
L’idée d’avoir votre propre haras en France vous a-t-elle traversé l’esprit ?
Nous sommes pleinement satisfaits de pouvoir compter sur l’équipe du haras de Montaigu pour gérer nos effectifs à l’élevage. Acheter un haras et trouver l’équipe ad hoc pour s’en charger n’aurait pas réellement de sens. Nous préférons travailler main dans la main avec des professionnels en qui nous avons confiance, pour construire année après année une opération solide et pérenne… Nous avons déjà élevé deux chevaux de Gr1 avec Es la Vida et Sea the Lady, et maintenant nous rêvons encore de gagner des courses de Gr1.