Roger O’Callaghan : « Good Guess va faire une bonne première saison de monte »
Les 12 et 13 janvier, les haras irlandais ouvrent leurs portes pour l’ITM Irish Stallion Trail. Jour de Galop a pris la route pour partir à la rencontre des grands de l’étalonnage européen juste avant le coup d’envoi de la saison de monte.
On fait difficilement plus irlandais que Roger O’Callaghan. Et on fait difficilement plus irlandais que le haras familial, Tally-Ho Stud, avec sa petite cour tout en pierre où défilent visiteurs et étalons. Quelques mots, une tasse de thé ou un whisky : les éleveurs défilent et il est bien difficile de savoir qui vient pour une saillie à 50.000 € et qui vient pour celle à 5.000 €, car tout le monde porte le même bonnet et les mêmes baskets… à l’irlandaise !
C’est un peu caricatural de le formuler ainsi, mais le capital est vraiment dans les chevaux et pas dans l’ostentatoire. Véritable référence sur le créneau de la vitesse et de la précocité, Tally-Ho a une méthode bien rodée pour sortir des étalons. Cela ne veut pas dire que ça fonctionne à chaque fois. Mais tout de même.. Depuis 1997, pas moins de neuf champion first crop sire ont débuté ici. Difficile de faire mieux.
Et c’est un cercle vertueux car les 200 juments maisons ont sorti un paquet de très bons 2ans – sans forcément avoir les plus grandes pages de catalogues – à l’image de The Platinum Queen (Prix de l’Abbaye, Gr1), mais aussi trois gagnants du Prix Morny (Gr1) en l’espace de sept ans, deux gagnants de la Commonwealth Cup (Gr1) et deux des Cheveley Park Stakes (Gr1). C’est presque un système intégré car Roger O’Callaghan pratique aussi le pinhooking de foals et les breeze up : « Comme tout le monde, j’ai déjà une idée sur mes 2ans. Il y a ceux que j’aime bien et même si on peut toujours avoir des surprises, c’est déjà un bon indicateur. »
Très tôt, la filière du pinhooking et des breeze ups a cloué au pilori un Bushranger (Danetime), qui ne s’en est jamais remis et a terminé sa carrière en Turquie après avoir débuté à Tally-Ho. Mais c’est cette même filière qui a détecté très en amont la qualité de Mehmas (Acclamation) et Kodiac (Danehill). Ils se sont ainsi imposés sur le devant la scène alors même, qu’au départ, ils n’avaient pas le profil le plus prestigieux. Mehmas n’a pas gagné de Gr1 et Kodiac n’a jamais remporté une épreuve black type (il est placé de Gr3).
Trouver les successeurs de Mehmas et de Kodiac
L’étoile de la maison, Mehmas (Acclamation) est un petit cheval mais il est vraiment bien fait, avec un vrai moteur. À bien y regarder, son voisin de box, Kodiac (Danehill) n’est pas très grand non plus… mais il est bien fait aussi ! Si vous vendez des foals, vous avez besoin d’étalons qui produisent beau. Roger O’Callaghan détaille : « Les étalons, il faut en essayer. C’est un métier où vous devez réinvestir en permanence dans les juments et dans les étalons. Nous avons eu de très bons étalons et des mauvais aussi. Il faut leur donner leur chance et se fier à ce que l’on voit. Je ne suis pas un homme de statistiques, je n’ai pas la patience pour cela et je me fis donc à ce que je vois. À Goodwood, Mehmas avait fait preuve d’un courage exemplaire pour venir à bout de Blue Point. Je vous invite vraiment à revoir cette course. Il a toujours tout donné et ce courage est la grande qualité qu’il transmet à sa descendance. Si Mehmas était un être humain, il serait cette personne qui se lève toujours de bonne humeur ! L’inverse d’un dépressif. Pour Kodiac, c’était un pari. Nous voulions un fils de Danehill et son frère Invincible Spirit faisait déjà parler de lui. Nous l’avons donc essayé et c’est devenu le grand étalon que tout le monde connait. Le premier critère, pour acheter un étalon, c’est qu’il soit dans vos moyens et qu’il soit sur le marché. Si vous cumulez ces deux éléments, votre liste est rarement très longue. Et dans cette liste, il faut essayer d’acheter le meilleur possible. »
Persian Force (Mehmas) est plus grand que son père et c’est vraiment un cheval qui sort de l’ordinaire physiquement. Très harmonieux, très équilibré, il flatte l’oeil et aura ses premiers foals en 2024. Good Guess (Kodiac) est lui aussi nettement plus grand que son illustre paternel. Il y a une certaine confiance autour des fils de Kodiac et, alors que le vieux sire approche des 23ans, Tally-Ho Stud a enfin un de ses fils en son sein. Quand on voit Good Guess dans la petite cour de pierre, on comprend encore une fois qu’il y a un “moule Tally-Ho” et que la nouvelle recrue se fond vraiment dedans. Roger O’Callaghan explique : « Il me tarde de recevoir Monsieur Saito et Sebastien Desmontils au haras pour qu’ils revoient le cheval. Je pense que Good Guess va faire une bonne première saison de monte. C’est un beau cheval et il suscite un réel intérêt. »
Briser le moule
Le patriarche Tony O’Callaghan a toujours dit à qui voulait l’entendre : « Nous avons toujours aimé les 2ans. Ils courent uniquement entre eux, ce qui rend la tache plus facile. Écoutez, les classiques se jouent essentiellement entre Coolmore, Juddmonte, Darley, Shadwell, l’Aga Khan et quelques autres acteurs majeurs. C’est très difficile de rivaliser dans ces courses. Nous avons donc fait un pas de coté vers les 2ans et cela nous a porté chance. »
Au royaume de la vitesse et de la précocité, il est toujours étonnant de voir que Tony O’Callaghan et ses fils Roger et Henry ont néanmoins régulièrement essayé de briser leur moule. Ce fut le cas avec Morpheus (Galileo), le propre frère de Frankel (Galileo). Ils se sont aussi positionnés sur Ace Impact (Cracksman) – en faisant une des plus grosses offres sur le cheval. Or il n’a pas exactement le profil d’une mobylette vite et précoce ! Mieux encore, ils font un pari sur la production de Persian King (Kingman) et Roger O’Callaghan confie : « J’aime beaucoup ce que je vois chez les Persian King. J’en ai plusieurs. Et vous pouvez l’écrire ! »