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vendredi 22 novembre 2024

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Auguste Rodin, le grand défi

LE DERBY ET LA BREEDERS’ CUP

Auguste Rodin, le grand défi

Mardi matin, il se promenait tranquillement dans les embouteillages à l’entrée de la piste de Santa Anita au milieu d’autres chevaux, d’un bien plus faible niveau mais également prêts à se lancer dans leur travail quotidien. Joli poulain bai, pas trop grand, bien équilibré dans sa façon de marcher, Auguste Rodin n’est pas un cheval comme les autres et ce double gagnant de Derby s’élancera samedi au départ du Breeders’ Cup Turf (Gr1) pour tenter de relever un défi historique.

Auguste Rodin (Deep Impact) est arrivé à l’ultime étape d’une saison estampillée “tout ou rien” ! Il a en effet très mal couru dans les 2.000 Guinées (Gr1) et les King George VI and Queen Elizabeth Stakes (Gr1). Toutefois, il a non seulement réussi le doublé Derby & Irish Derby, mais, après sa débâcle d’Ascot, il s’est aussi adjugé les Irish Champion Stakes (Gr1). John Gaines, lorsqu’il a inventé la grande réunion américaine de fin d’année, n’aurait jamais pensé que le Breeders’ Cup Turf pourrait se transformer en une course quasi-impossible pour un Derby winner qui, au début des années 80, était encore jugé par beaucoup comme le meilleur cheval d’Europe. Reste que le score des lauréats d’Epsom dans la Breeders’ Cup est particulièrement faible…

High Chaparral, le bon exemple

Et pour cause puisqu’un seul Derby winner a remporté une course de la Breeders’ Cup à 3ans, sur les cinq qui ont relevé le défi. Il s’agit de High Chaparral (Sadler’s Wells), lui aussi entraîné par Aidan O’Brien et qui, en 2002, avait remporté le Breeders’ Cup Turf à Arlington Park. Lauréat du Futurity Trophy (Gr1) tout comme Auguste Rodin, à 2ans, High Chaparral était arrivé sur le Derby avec deux succès acquis dans les trials. Il ne faisait pourtant figure que de second couteau chez Ballydoyle, derrière Hawk Wing (Woodman). Cela ne l’a pas empêché de dominer son sujet à Epsom avant de transformer le penalty annoncé, au Curragh, survolant son leader, Sholokhov (Sadler’s Wells). Il a ensuite fait l’impasse sur les Irish Champion Stakes, où il était déclaré partant, mais s’est présenté à Longchamp pour une rentrée dans le Prix de l’Arc de Triomphe après plus de trois mois d’absence. Pour rappel, il s’était classé troisième de Marienbard (Caerleon) et Sulamani (Hernando). La course phare du galop européen lui a servi de préparation pour arriver au top au départ d’une Breeders’ Cup qui, à l’époque, offrait une allocation bien plus importante. High Chaparral était le grand favori et c’est sans problème qu’il a dominé l’américain With Anticipation (Relaunch).

Golden Horn a trouvé Found

Avant et après High Chaparral, qui a également remporté – dead-heat avec Johar (Gone West) –, l’édition 2003 à Santa Anita, quatre Derby winners ont pris part à une course de la Breeders’ Cup. Le dernier en date est le malheureux Anthony van Dyck (Galileo), troisième sans excuses en 2019, à Santa Anita, dans l’édition de Bricks and Mortar (Giant’s Causeway). Golden Horn (Cape Cross) était le grandissime favori en 2015, à Churchill Downs, mais il est tombé sur Found (Galileo), future lauréate du Qatar Prix de l’Arc de Triomphe mais battue lors de ses cinq tentatives dans les Grs1, à 3ans. Et cinq ans plus tôt, un autre auteur du doublé Derby & Arc de Triomphe, Workforce (King’s Best), s’était présenté à Churchill Downs pour une passe de trois mais son entraîneur, Sir Michael Stoute, avait jugé le terrain trop léger et il l’avait déclaré non partant trois jours avant l’épreuve…

Un Galileo bien triste sur le dirt

C’est en 2001 que Galileo (Sadler’s Wells) a effectué le déplacement à Belmont Park avec un objectif différent : la Breeders’ Cup Classic. C’était une édition pas comme les autres : New York était encore sous le choc de l’attentat des Twin Towers et personne, lors des matinées passées à l’hippodrome, n’avait le goût à l’amusement… Galileo, qui avait encore en tête une course dure – et perdante – dans les Irish Champion Stakes face à Fantastic Light (Rahy), était triste lui aussi. Il galopait le matin sur la piste d’entraînement comme un cheval qui avait plutôt envie de brouter l’herbe dans un paddock. Galileo s’est pourtant aligné au départ et il a terminé sixième, déjà battu dans le dernier tournant. Une victoire sur le dirt aurait pu changer l’histoire de l’élevage en Europe en lui assurant un meilleur carnet de poulinières au départ de sa carrière d’étalon ou, mais c’est de la science-fiction, il aurait officié aux États-Unis. Il a perdu et c’est tant mieux pour Coolmore et l’élevage du vieux continent.

Dr Devious, le cadeau d’anniversaire

Le premier Derby winner qui a couru à 3ans dans la Breeders’ Cup était Dr Devious (Indian Ridge), entraîné par Peter Chapple-Hyam, en 1992. Le poulain avait déjà trouvé sa place au sein du grand livre des courses de galop suite à son succès à Epsom, classique préparé par le biais d’un trial pas comme les autres : le Kentucky Derby (Gr1). Bien sûr, il s’agissait d’une autre époque et il faut savoir que le cheval fut acheté après son succès dans les Dewhurst (Gr1) par Jenny Craig comme cadeau d’anniversaire pour son mari, Sidney, qui rêvait d’avoir un partant à Churchill Downs. Et il s’est finalement retrouvé dans l’enclosure des vainqueurs d’Epsom… Dr Devious, qui a aussi remporté les Irish Champion, s’est classé quatrième du Breeders’ Cup Turf avant de devenir étalon au Japon puis de passer par Coolmore et l’Italie où il a terminé ses jours à l’âge vénérable de 30ans en Sardaigne, au sein du haras de Salvatore Bruno.

Il faut un champion(ne) pour survivre aux classiques

Les vainqueurs du Prix du Jockey Club qui ont couru le Breeders’ Cup Turf sont au nombre de deux (Celtic Arms et Hernando). Quoi de plus logique : arriver en novembre au top pour un poulain ou une pouliche qui a traversé une belle campagne classique est très difficile. On se souvient toutefois d’authentiques championnes comme Goldikova (Anabaa), qui avait couru la Poule d’Essai et le Prix de Diane l’année de Zarkava (Zamindar), avant de remporter trois fois la Breeders’ Cup Mile, de Miesque (Nureyev), classique et double lauréate du Mile, ou encore d’Ouija Board (Cape Cross) qui, après les Oaks et les Irish Oaks a brillé dans le Filly & Mare Turf. On ne passera pas sous silence non plus des chevaux injustement oubliés tels que Karakontie (Bernstein), qui avait remporté la Poule et le Mile dans la même année…

Des américains amoindris…

C’est dur pour les Européens mais aussi pour les Américains. Deux des vainqueurs des courses de la Triple couronne 2023 ne seront pas au départ samedi : Mage (Good Magic), lauréat du Kentucky Derby (Gr1), n’a pas été déclaré partant et Arcangelo (Arrogate), qui avait remporté les Belmont Stakes (Gr1), a dû renoncer mardi. Il reste National Treasure (Quality Road) qui a connu son jour de gloire dans les Preakness (Gr1) mais son entraîneur, Bob Baffert, a décidé de le courir dans le Breeders’ Cup Dirt Mile (Gr1). Le poulain fait partie des outsiders. Le doublé Kentucky Derby & Breeders’ Cup Classic dans la même saison a été réussi quatre fois. Authentic (Into Mischief) a remporté la Breeders’ Cup Classic en 2020 mais il s’agissait d’une année où le calendrier avait été bouleversé par la Covid et le Kentucky Derby s’était déroulé en septembre. En 2015, American Pharoah (Pioneerof the Nile), après avoir réussi la Triple couronne, a gagné de six longueurs la Breeders’ Cup. Avant lui, nous avions eu deux lauréats de Kentucky Derby qui avaient su conserver leur meilleure forme jusqu’à la fin de la saison : Unbridled (Fappiano), en 1990, et Sunday Silence (Halo), en 1989. Oui, c’est ce même Sunday Silence que l’on retrouve comme père de Deep Impact dans le pedigree d’Auguste Rodin. Un signe ? 

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