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samedi 28 décembre 2024

Keeneland

Les ventes à l’américaine

Il faut être un vrai stakhanoviste pour avaler les 12 sessions de la vente – avec un seul jour « off » ! Lexington n’est pas Deauville : oubliez les attractions touristiques et les adresses gourmandes ne sont pas nombreuses… On y va uniquement pour acheter des yearlings et rêver. La vente en elle-même est un vrai spectacle. Au moment des inspections, l’Å“il non averti est choqué par les modèles, des monstres par rapport au standard européen ! Heureusement, les chevaux sont aujourd’hui moins « gonflés », un peu plus nature. Le ring est aussi bien différent de ce que l’on connaît : les fainéants qui n’aiment pas faire le tour des écuries ne peuvent pas attendre le dernier moment pour apprécier la façon dont les poulains se déplacent. Les yearlings arrivent sur le ring accompagné par des piliers de rugby (mais en gants blancs) et ils ne bougent pas une oreille quand les crieurs récitent leur chanson, bien différente de celle qu’on écoute en Europe. Ils parlent de dollars, pas d’autres appréciations, pas de mots gentils pour titiller les acheteurs. D’un coup le marteau tombe. Au suivant !

Douze sessions pour tous les budgets

Le poids de la September Sale sur le marché américain est énorme. L’an dernier, le chiffre d’affaires des ventes de yearlings américaines a atteint le record de 624,21 millions de dollars (581,38 M€) et la September Sale a pesé pour 67 % avec 418,27 millions (387,71 M€) et 2.963 vendus. En comparaison, le chiffre d’affaires des 22 ventes de yearlings qui ont eu lieu en 2022 en Europe a aussi marqué un record… Mais de 444,11 millions d’euros pour 5.795 vendus. Keeneland représente donc, en volume d’enchères, 87 % de l’ensemble des ventes du vieux continent. Tous les segments du marché sont représentés lors des douze sessions. Un seul jour de repos, le vendredi, intervient après le haut de gamme qui est partagé dans le book 1 (383 sujet) et le book 2 (728) et avant les quatre autres books. Le prix moyen du book 1 se situe autour de 500.000 $, baisse à 265.000 $ pour le book 2 mais il faut attendre le book 4 pour un prix moyen de 78.000 $ alors que les 362 yearlings du book 6 ont affiché 15.500 $.

Lundi, onze acheteurs différents pour le top 11

Keeneland est un moment clé pour les Américains mais aussi pour tous les analystes du marché. Lors de la session de lundi on a enregistré la hausse fractionnelle du prix moyen à 503.000 $ (468.500 €) et une baisse de 3 % à 55,33 millions (51,53 M€) du chiffre d’affaires. La session a enregistré 8 lots millionnaires, un de moins qu’en 2022, mais l’indicateur le plus important vient de la colonne des acheteurs. Onze yearlings ont trouvé preneurs lundi à 900.000 $ ou plus avec 11 acheteurs différents. L’an dernier, sur l’ensemble de la vente, 30 yearlings avaient été adjugés pour un prix à sept chiffres, à 18 acheteurs différents. Il faudra attendre les quatre premières sessions pour revenir sur ce sujet, mais la première impression est que les propriétaires capables de s’offrir un millionnaire ou presque sont plus nombreux que les années précédentes.

Les changements du marché en dix ans

Prenons en repère deux autres ventes de Keeneland qui se sont tenues à des moments significatifs. En 2018, le marché américain des yearlings avait atteint son top après la grande crise mondiale de 2008. Le chiffre d’affaires s’élevait alors à 554,35 millions, dont 387,64 à la September Sale. On comptait 27 millionnaires achetés par 13 entités différentes. Godolphin en avait acheté sept alors que Coolmore et Shadwell s’étaient assuré trois millionnaires chacun.

Cinq ans plus tôt, en 2013, les ventes de yearlings aux États-Unis avaient retrouvé confiance après avoir enregistré une baisse à moins de 300 millions en 2010 (- 45 % sur 2007). Le chiffre d’affaires du segment avait remonté à 418 millions, dont 287 pour la seule vente de Keeneland September. Le nombre de millionnaires s’élevait à 18 et 15 acheteurs avaient signé au moins un bon à sept chiffres, avec quelques associations formées par des grands haras américains. Ce n’était pas inédit mais cette tendance s’est beaucoup développée ces dernières années.

Plus de 4.000 yearlings proposés

Keeneland September, c’est au-delà d’une grande vente avec plus de 4.000 yearlings étalés sur six books et douze sessions. Il faudra attendre le passage du dernier lot, le numéro 4.198, un poulain par l’inconnu (en Europe) Bee Jersey (Jersey Town) et demi-frère du gagnant de Gr2 Tax (Arch), pour dresser une analyse statistique du marché. Quand un jour un courageux voudra se lancer dans l’effort titanesque d’écrire l’histoire économique et commerciale de l’élevage du pur-sang, Keeneland sera l’un des points de départ et d’inspiration. Mais il faudra un Thomas Piketty et une douzaine d’assistants pour arriver au bout de l’entreprise…  

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