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lundi 23 décembre 2024

AccueilA la uneQui ose gagne ! 

Qui ose gagne ! 

Qui ose gagne ! 

Jour de Galop. – Dix des douze Grs1 courus en France en 2023 ont été remportés par des chevaux français. Quel est votre point de vue sur cette réussite après des années difficiles ?

Nicolas Caullery. – Je pense que les résultats de certains prouvent que c’est possible et donnent envie à d’autres. Hier, un Caullery, avec un effectif correct, a pu battre les Anglais dans les Grs1 et les regarder dans les yeux. Je pense que cela donne envie. Cela étant dit, les Britanniques ont beaucoup plus de chevaux que nous et avec des origines prestigieuses. Et ils ont une culture un peu différente. Ils n’ont pas peur de courir. Ils peuvent courir avec un cheval comme Saint Lawrence dans un handicap à Royal Ascot où il y avait 27 partants. Pour eux, c’est un plaisir, c’est une opportunité de se retrouver entre amis, de boire un verre. Et ils n’ont pas peur de courir parfois à cinq jours. Même chez Coolmore : ils ont le top du top mais ils courent, les chevaux sont là pour ça. Ils sont soignés comme il faut, tout est fait pour qu’ils soient dans de superbes conditions et ils n’ont pas peur de courir.

Votre message est donc « Osez ! »

Je crois qu’en France, nous avons parfois peur d’être battus pour ne pas dévaloriser un cheval. On a ce complexe d’infériorité. Et alors ? On a vu des champions être battus. Il y a des champions d’exception qui restent invaincus et nous n’avons jamais envie qu’ils soient battus. Mais il faut accepter de l’être. Goldikova était une championne, elle est tombée dans l’année de Zarkava, elle a été battue. Je crois que les Britanniques n’ont pas ce complexe du non-résultat. S’ils sont battus, ce n’est pas grave, ce sont des chevaux de course. Ils n’alignent pas que des bâtons. Il faut courir quand les chevaux sont bien, évidemment. Les gagnants d’Arc, ils ne les ménagent pas. Et derrière, ça produit, ça donne des poulinières et des étalons comme chez nous.

La récente enquête de France Galop sur les propriétaires a indiqué que ces derniers souhaitaient davantage de communication de la part des entraîneurs. Est-ce selon vous un point crucial ?

Je communique beaucoup avec mes propriétaires mais je me rends compte que je peux avoir des lacunes. Je ne peux pas faire 26 heures dans une journée de 24 heures. Ce n’est pas facile. Certains propriétaires ne travaillent pas forcément, ont des heures un peu plus larges et des moments plus cools. Certains peuvent estimer ne pas avoir assez de nouvelles mais en ce qui me concerne, en essayant de faire les choses au mieux, je passe ma vie au téléphone. Je peux comprendre certains de mes collègues, cela demande une certaine organisation. Appeler après une défaite quand on était sûr de bien faire – c’est différent si tout le monde est sur place –, cela demande une certaine force de caractère. Pour moi, c’est important de le faire. Cela pourrait certainement être encore amélioré car nous avons désormais beaucoup d’outils à disposition. Nous avons les réseaux sociaux, il est possible d’embaucher des personnes pour le faire avec des images, de la musique. Il est primordial de communiquer mais c’est difficile à entreprendre tout seul.

Dimanche, il y a eu des moments très forts entre vous et les époux Wingtans. Quelle est votre relation ?

Notre rencontre s’est faite par hasard. L’histoire est belle. Ils sont devenus des amis et, pour eux, cette victoire est la cerise sur le gâteau, cela fait quarante ans qu’ils élèvent. C’est un grand moment pour eux et aussi pour moi puisque cela peut être un élément déclencheur pour la suite de ma carrière, qui n’est pas finie ! Pour eux, c’est une magnifique histoire et c’est une histoire d’amitié. On est une bande d’amis et la majorité de mes propriétaires sont des gens qui sont devenus des amis. Dimanche, des propriétaires d’autres chevaux étaient là et ceux qui n’ont pas pu venir ont envoyé des WhatsApp. Tout le monde a vécu cette histoire comme si c’était aussi leur cheval. On a une atmosphère particulière, comme une petite famille. C’était fabuleux.

Nous avons l’impression que vous êtes très proches de vos propriétaires…

Entraîner des chevaux est mon travail. Pour les propriétaires, avoir des chevaux de course est un plaisir. Si vous ne pouvez pas leur en donner, je ne vois pas l’intérêt de le faire. Il n’y a qu’un gagnant par course… Si on court et qu’on est huitième, je leur dis qu’on va aller boire un coup, prendre un petit gâteau, passer du temps ensemble et passer un bon moment. Et si on gagne, on fait la même chose. Le plus dur est d’être bon dans la défaite. Il y a des déçus tous les jours. Hier, on a gagné mais on a un peu déchanté avec Fort Payne. C’est ainsi, il y a des explications pour tout et il faut savourer le moment. La vie est trop courte ! J’ai vraiment ce principe : prendre du plaisir même s’il est difficile d’accepter une mauvaise course, une gêne, une chute, un incident… Il y a tellement de paramètres et quand on gagne, il faut savourer. C’est tellement dur ! Hier, il y en avait neuf autres qui espéraient gagner, donc on savoure.

Votre première victoire à Dubaï remonte à janvier 2017, avec Golden Wood également pour les époux Wingtans. Est-ce que cela vous avait aussi aidé à franchir un cap comme entraîneur ?

J’ai le souvenir de la victoire de Golden Wood à Meydan encore bien en tête. C’était ma World Cup ! Avec le temps et l’expérience, on appréhende les choses différemment mais on dit tout le temps que ce n’est pas facile d’aller courir là-bas… Parce qu’on se met à un niveau inférieur. On se dit qu’ils sont meilleurs que nous, qu’il y a les Godolphin, les Shadwell, beaucoup de grosses casaques qui ont des moyens importants. On se met en-dessous mais il en va du sport en général. Il y a des champions mais il faut jouer les matchs et donc courir les courses. Donc oui, cela a été un élément déclencheur, un coup de poker qui a été magique. Je venais de récupérer le cheval, nous étions allés courir à Bordeaux où il s’était classé quatrième en courant bien. Et j’ai dit à Raymonde que nous irions à Dubaï et elle n’y croyait pas, elle n’arrivait pas à l’envisager et on a gagné. Et je me suis dit : « J’ai eu raison, il faut y aller, il ne faut pas avoir peur ». Il faut oser sinon il ne se passe rien ! Et on réalise que c’est possible. Cela reste des courses de chevaux. Et une défaite n’est pas une défaite. Cela permet d’avancer. J’arrive à guider mes propriétaires dans ce sens-là, ça marche et tant mieux !

Quel était votre état d’esprit avant la course ?

J’étais super confiant. De mon cheval, d’une préparation qui s’est passée comme prévu. La seule chose qui nous fait douter, c’est l’opposition. Il y a les anglais et on les regarde toujours avec une vision différente, surtout sur ce type de distance. Mais King Gold ne pouvait pas mal courir. Il est toujours difficile d’envisager de gagner, on y va « petits bras » même si on ne néglige pas la qualité de King Gold et qu’on se remémore ses courses précédentes. Mais on a toujours peur de ces Anglais. Peur d’aller courir chez eux, peur de les recevoir. On se met à un niveau en-dessous. Mais il avait tellement bien travaillé, il était tellement sur la montante qu’il ne pouvait pas mal courir.

Comment avez-vous vécu le passage du poteau et le développement de la photographie ?

C’est déjà toujours un grand moment de courir ces courses-là. Aux 100m, là où j’étais, King Gold est venu comme pour gagner « largement » puis il y a eu la petite photo où tout peut basculer… Sur le ralenti, avec la caméra sans doute biaisée, il y a un avantage pour l’anglais et seule la photo peut donner le verdict. Tant mieux que cela ait été dans notre sens et quelle joie de voir le 8 s’afficher !

King Gold se révèle pleinement à 6ans. Pourquoi, selon vous ?

Très jeune, il montrait beaucoup de moyens le matin. Il a eu des soucis de santé, il n’était pas consolidé dans son physique. Il a débuté par la force des choses, puis nous sommes repartis un peu à zéro suite à ses pépins. L’élément déclencheur a été cette année mais, auparavant, il avait déjà fait son petit bonhomme de chemin. Il faut se rappeler qu’il avait battu Marianafoot à Cagnes-sur-Mer, ce qui n’était pas anodin ! King Gold l’avait battu six mois après son succès dans le Maurice de Gheest [dans le Prix Cirrus des Aigles 2022, ndlr]. Il a fait son année puis il est allé à Meydan. J’aime aller là-bas, il y a de belles courses à courir, il y a le soleil et je l’ai testé sur le dirt. Cela s’était plutôt bien passé, même s’il avait été malheureux car je pense que nous aurions dû nous imposer au moins une fois, voire deux. Il est rentré et de fil en aiguille… Entre sa victoire de Gr3 et le Maurice de Gheest, il avait vraiment fait un bond.

Vous avez dit que son hiver à Meydan l’avait aidé à franchir un cap. Pourquoi ?

La façon de travailler est complètement différente quand on est là-bas. On est sur l’hippodrome et très bien accueilli. Il y a le climat, les installations et les équipes, avec une personne pour deux chevaux. Cela permet un travail très individualisé. Il y a les massages, la piscine, on les marche, ils mangent de l’herbe… C’est du travail aux petits soins que l’on ne peut pas forcément faire en France, pour diverses raisons comme le personnel, les temps de travail demandés par le gouvernement. Et il y a les courses de Dubaï : il montrait déjà beaucoup de vitesse mais le dirt lui a donné une vitesse de croisière assez impressionnante et il reste serein. Depuis qu’il a couru sur le dirt, cela a été facile pour lui ensuite ici. L’hiver au soleil reste un vrai atout pour les chevaux. On profite de tout là-bas. Il n’y a pas de pression pour les équipes. Je n’en mets pas à Chantilly non plus mais, là-bas, on a beaucoup de temps pour les chevaux, on est à leur écoute. Tout est fait pour que cela se passe bien et, à chaque fois que j’y suis allé, ce fut le cas.

Vous venez de gagner un Gr1, à quelques jours des ventes de yearlings Arqana. Souhaiteriez-vous rentrer plus de yearlings dans votre écurie ?

Rentrer des jeunes est toujours un objectif. C’est l’avenir, c’est le rêve. Mais pour y arriver, il faut du nombre. Cela demande du temps. Et il y a les tardifs, ceux qui semblaient précoces mais ne le sont pas. Plus vous avez de nombre, plus vous avez de chance d’avoir de bons chevaux. Rentrer des yearlings n’est pas une fixation. Je dirais que les 2ans représentent un tiers de mon effectif, même si j’en ai remis quelques-uns en vacances. Le 2ans, c’est une autre façon de travailler. Je ne suis pas complexé d’avoir un cheval pour un handicap ou un réclamer à travailler. Quelqu’un comme Jean-Claude Rouget le fait très bien. C’est un grand monsieur, un grand entraîneur, il peut aller à Dax pour gagner un réclamer. Sa notoriété s’est faite avec les années, c’est un travail de longue haleine. En ce qui me concerne, j’ai envie de travailler avec des gens qui ont envie de travailler avec moi, pas juste pour serrer des mains. Ils savent que je peux entraîner un bon cheval. Si j’ai des grandes casaques, des grandes origines, je suis certain que je vais gagner de belles courses parce que j’ai une bonne équipe. Nous avons montré, avec de la petite mécanique, que nous étions capables de faire de belles choses.

Que représente Deauville pour vous ?

Deauville est une chance ! La preuve : les Anglais aiment venir ici. Tout s’y prête, vous avez la course, l’avant-course, l’après-course. Un casino, une belle ville, de bons restaurants, de superbes tables, de bons vins, des haras, des ventes, de belles courses, une plage pour les enfants. C’est the place to be, on ne peut pas faire mieux pour tous les passionnés de chevaux. Je n’ai jamais entendu quelqu’un venir aux courses à Deauville et dire « c’est moyen ».

Avec son cœur de rocker

Nicolas Caullery est entraîneur mais aussi chanteur du groupe Electrik Monday. Il nous parle de son autre passion : « La musique, c’est un moment de détente et de partage avec les amis. Cela permet de boire une bière bien fraîche, un bon barbecue en écoutant un bon morceau de musique. Jouer de la musique demande du travail. Le groupe Electrik Monday est parti d’une idée avec Eric Selter. On mangeait un sandwich et on s’est dit pourquoi ne pas faire un groupe de rock. On s’est dit pourquoi pas, pour nos potes, pour les soirs d’anniversaire, les barbecues du samedi. On a demandé à des amis qui faisaient un peu de musique et tout est parti de là. On a fait ce qu’on avait à faire et un jour, on s’est dit qu’on allait tenter de franchir un nouveau palier et jouer dans un bar. C’était incroyable ! On avait tellement fait de pub que tout le monde ne pouvait pas rentrer dans le bar. C’était les copains, bien sûr. Et de fil en aiguille, les soirées, la fête de la musique… On a fait deux fois le point to point de Château-Gontier, Oh Courses à Chantilly, le Pin-au-Haras. Je profite un peu de mon nom dans les courses, le public vient pour les courses et reste pour le concert. Maintenant, des gens viennent pour nous voir. On se régale ! Nous avions fait la fête de la musique à Chantilly sur la grand-place et quand vous avez 3.000 personnes en train de danser, vous ressentez quelque chose de juste incroyable. Mieux qu’une victoire de Gr1 ? Franchement, être sur scène a toujours été mon truc, j’avais fait un peu de théâtre. J’ai vraiment du plaisir sur scène. C’est dur de dire que c’est mieux que de gagner un Gr1 mais je mettrais peut-être un petit pourcent de plus ! Quand vous donnez aux gens et qu’ils vous le rendent, le groupe… C’est difficile à expliquer. Le rock, émotionnellement, c’est magnifique, ce sont des vibrations, il faut le vivre pour le croire. Je suis un fan de musique en général. Et une bonne musique, une belle vue et des amis autour, cela me suffit. »

Au sommaire du Talk de JDG Radio

Pour écouter la joie communicative de Nicolas Caullery, rendez-vous dans le Talk de JDG Radio. Autre invité, Vincent Le Roy nous parle de son « Cercy » breton. Retrouvez aussi l’analyse élevage d’un grand week-end de courses. Pour écouter, c’est ici !

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