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jeudi 21 novembre 2024

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Willie Browne

Willie Browne, saint patron des breeze up

C’est une figure tutélaire du petit milieu des ventes de 2ans montés. Pionner de ce métier en Europe, il le pratique depuis 45 ans avec succès. Jeudi, après les breeze, Willie Browne nous a livré son sentiment…

Par Adrien Cugnasse

ac@jourdegalop.com 

Le statisticien britannique Tom Wilson a publié une étude assez passionnante sur les breeze up européennes de 2018 à 2022. C’est l’édition 2019 d’Arqana qui remporte la palme avec 10,18 % de gagnants black types. C’est énorme. Vient ensuite l’édition 2018 de la vente de Deauville (8,03%) et en troisième position la Craven breeze up 2018 (4,26 %). Willie Browne a largement contribué à la réussite de la vacation pour 2ans montés d’Arqana en y vendant des chevaux comme Sakheer (Zoffany), Rockemperor (Holy Roman Emperor), Tropbeau (Showcasing), Summer Romance (Kingman)… pour ne citer que les plus récents.

Il a adoré la piste

Jeudi, pour les breezes, le gazon de Deauville était assoupli par la pluie. Et l’homme de Mocklershill nous a confié : « C’est la meilleure piste sur laquelle nous ayons breezé cette année. Un peu souple, mais de grande qualité. Nous sommes ravis de venir ici, c’est du bon travail, la piste est magnifique.  La journée de vendredi va être très chargée, avec certainement beaucoup d’inspections. Nous avons déjà été très occupés jeudi. Mais nous pensons être sollicités de manière exceptionnelle demain pour voir les chevaux, compte tenu du nombre et du profil des acheteurs internationaux qui ont fait le déplacement. Je suis très enthousiaste au sujet de cette édition 2023. Cette vente de Deauville nous donne plus de temps pour préparer les 2ans. C’est très bénéfique pour ceux qui ont de la taille et du volume, comme par exemple les poulains pour la deuxième partie de la saison de 2ans. Ce petit surplus de temps leur fait beaucoup de bien. À Deauville, les acheteurs sont plus indulgents sur le chronomètre, par rapport aux ventes anglaises notamment. C’est une chance pour les poulains un peu moins précoces. Les chevaux avec du modèle ne sont pas faits pour foncer sur 400m : les gens qui viennent chez Arqana l’ont compris. » Willie Browne a 19 lots au catalogue, dont une partie significative n’est pas passée en vente ou n’a pas trouvé preneur sur le ring en tant que sujets yearlings. Certains ont des pedigrees assez spectaculaires, comme le frère de Palace Pier (Kingman) par Blue Point (Shamardal), le propre frère de Txope (Siyouni), un Frankel (Galileo) de grande famille, un Justify (Scat Daddy) avec une mère gagnante de Gr1… : « Quand les éleveurs sont prêts à envoyer aux breeze up des chevaux de ce calibre, c’est un signe de grande confiance dans ce type de vente. L’évolution est très nette. La progression de ces ventes au fil des décennies est en tout point spectaculaire. »

Comment cela a commencé

L’histoire de Willie Browne est finalement assez peu connue en dehors son île de naissance. Tout commence dans l’Irlande rurale des années 1940. Mickey, le père de Willie, fut le premier des Browne à s’intéresser aux chevaux de course. Parti de rien, il est devenu un jockey assez connu dans l’après-guerre. En 1951, la famille déménage à Mocklershill où le père entraîne. Willie Browne a 5 ans. À l’adolescence il rejoint l’entreprise familiale. Et au sujet de cette époque, il confiait à The Irish Field en 2017 : « J’ai quitté l’école très tôt, car mon père avait besoin de moi. Ce fut une erreur que je regrette aujourd’hui. J’ai suivi le circuit traditionnel : les poneys de show puis les point-to-point. » Willie Browne a remporté 120 de ces épreuves… et à peu près autant de courses officielles : « J’ai monté mon premier gagnant à 14 ans. C’était trop jeune, trop tôt. Je le regrette aussi. À l’adolescence, j’ai eu beaucoup de chutes et à 23 ans je n’avais plus envie de monter en course. Se faire mal si jeune, c’est lourd en conséquences. J’ai continué, avec mon frère, à travailler pour notre père à l’entraînement et au débourrage. Nous tirions le diable par la queue. » Alors qu’il n’avait pas encore 30 ans, sa première épouse décède des suites d’une longue maladie. Un évènement, dans des conditions économiques difficiles, qui l’a poussé à essayer une autre voie pour s’en sortir. La légende dit que c’est Tony O’Callaghan qui aurait été le premier, en Irlande, à vouloir monter des ventes de 2ans montés. Une idée qui remonte à 1976. Willie Browne a rejoint le mouvement en 1978 : « Nous étions trois, avec mon père et mon frère, à essayer de vivre de la même entreprise. Nous n’avions pas d’autre choix que d’essayer quelque chose de différent. Au départ, nous apprenions sur le tas. Personne ne savait vraiment ce qu’il fallait faire… Depuis le départ, mon père achetait des chevaux pas cher pour les revendre. Cette culture commerciale était dans la famille. » Rapidement, l’homme de Mocklershill (il a gardé le nom même s’il n’y habite plus !) s’est fait une notoriété dans ce nouveau métier. Il a traversé toutes les crises et les périodes d’euphorie de notre microcosme pour être toujours l’un des leaders du secteur à plus de 70 ans.

Deux métiers différents

Willie Browne entraîne une poignée de chevaux, pour le plaisir… et souvent pour trouver une solution à ceux qui n’ont pas trouvé leur place aux ventes. Spirit Gal (Invincible Spirit), scratchée avant la breeze up de Goffs 2022, a gagné une Listed en Irlande l’année dernière avant de courir la Breeders’ Cup. Elle n’a couru qu’une fois en 2023 – sous l’entraînement d’André Fabre –, terminant troisième du Prix Imprudence (Gr3). Willie Browne confiait en 2017 : « Je suis un entraîneur raté ! Si j’étais riche, je préférerais gagner une course à Dundalk que vendre un cheval de breeze up pour un million. Mais ce n’est pas le cas… et j’ai de la satisfaction à préparer les 2ans pour les ventes… » Former des jeunes chevaux pour les breeze up, ce n’est pas exactement la même chose qu’entraîner un cheval pour aller aux courses. Mais cela s’en rapproche tout de même pas mal !  : « La preuve la plus évidente de cela, c’est que certains chevaux vont désormais aux courses seulement quelques semaines après leur passage en vente. À mon sens, la véritable différence, c’est que nous les “protégeons” en essayant de ne pas les travailler sur 800m ou 1.000m. Nous avons tendance à le faire sur 500m ou 600m. » Toujours en 2017, Willie Browne expliquait : « Lorsque les gens ont commencé à chronométrer, la crainte, c’était qu’il soit de plus en plus difficile de bien vendre un beau cheval bien né s’il ne faisait pas le temps. C’était assez pénalisant pour un sujet ayant besoin de distance. Mais les acheteurs ont pris du recul et ils font à nouveau confiance aux beaux chevaux avec de la marge, même s’ils ne breezent pas exceptionnellement vite. » Au sujet des achats, il confiait : « Le premier critère, cela reste le physique. Je ne peux pas acheter des tordus ou un cheval qui ne vous tape pas dans l’Å“il. C’est mon avis. Il faut acheter des chevaux qui vont passer le test de la préparation. Pour les breeze up, plus l’étalon est populaire, plus de gens vont regarder le produit… la mère n’a probablement pas autant d’importance qu’elle devrait avoir aux yeux des gens. Car une bonne jument peut donner un bon cheval avec n’importe quel étalon. »

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