Pascal Bary, Monsieur Jockey Club
Mardi après-midi, Pascal Bary a participé à la conférence de presse en amont du Qatar Prix du Jockey Club (Gr1). Souriant, visiblement détendu, l’entraîneur cantilien va pourtant tenter de remporter un septième sacre dans cette épreuve.
Par Thomas Guilmin
tg@jourdegalop.com
Pascal Barry va présenter Feed the Flame (K) (Kingman), lui qui a déjà sellé avec succès Celtic Arms (Comrade in Arms) en 1994, Ragmar (Tropular) en 1996, Dream Well (Sadler’s Wells) en 1998, Sulamani (Hernando) en 2002, Blue Canari (Acatenango) en 2004, et Study of Man (Deep Impact) en 2018. Jean-Louis Bouchard a déjà remporté à quatre reprises le classique avec l’entraîneur cantilien. Son représentant relève un sacré défi car il n’a couru qu’à deux reprises. Pascal Bary explique : « Parmi les six gagnants de Jockey Club que j’ai pu entraîner, Sulamani avait couru trois fois, dont une victoire acquise dans le Prix de l’Avre (L). Certes, Feed the Flame n’a couru qu’à deux reprises, mais c’est un profil complètement différent. Ce poulain s’est réveillé très tard. À 2ans, j’ai eu énormément de problèmes avec lui, je n’arrivais pas à l’entraîner. Ce n’est que vers le début du mois de mars que Feed the Flame a commencé à se révéler. Lorsqu’il a commencé à travailler régulièrement, il a accompli énormément de progrès. Bien sûr, il n’a couru que deux fois mais je pense qu’il a suffisamment de métier. Dimanche, j’attends un très bon comportement de sa part. »
Il s’est déclenché tardivement
En France, les engagements pour le Jockey Club interviennent généralement à la mi-février. Et à cette époque, Feed the Flame était visiblement encore loin d’être un prospect classique : « Au moment où il fallait engager nos pensionnaires dans le Prix du Jockey Club, jamais je n’aurais pensé que Feed the Flame allait être au départ. Comme on peut le voir, il s’agit d’un poulain impressionnant physiquement. Dès lors, comme beaucoup de chevaux de ce gabarit, il a mis du temps avant de trouver son action. Il est vraiment venu tardivement. Mais, pour ne rien vous cacher, Feed the Flame est déjà supplémenté. »
Une fois déclenché, il a eu un parcours classique
Feed the Flame a débuté Longchamp dans le Prix Juigné (Inédits), course dans laquelle de nombreux 3ans tardifs et qualiteux ont effectué leurs premiers pas. Á 3ans, il a survolé l’une des préparatoires au classique cantilien, le Prix de Ferrières (Classe 2) : « Lorsqu’il a débuté, il y a six semaines maintenant, Feed the Flame a gagné facilement. Ce jour-là, je m’attendais à ce qu’il gagne mais pas avec autant de marge. Ensuite, il est revenu très rapidement en compétition, à vingt jours, car je voulais le recourir une fois tout en lui laissant du temps avant le classique. Nous avons pris la décision de le supplémenter après sa deuxième victoire, qui s’est avérée particulièrement aisée elle aussi. »
Lui donner du temps après ses deux courses
Feed the Flame n’a encore jamais été vu au niveau black type. Et pour cause, son entraîneur a toujours voulu le préserver pour le premier dimanche de juin : « Feed the Flame connaît le champ de courses de Chantilly puisqu’il y est allé avant de débuter. Il y est retourné mardi dernier [le 23 mai, ndlr]. Avec lui, j’ai surtout cherché à laisser un laps de temps suffisamment long entre ses deux premières courses et le Jockey Club. D’autant que ses deux premières apparitions n’étaient pas très espacées. Même si le poulain a gagné sans avoir à forcer son talent lors de ces deux courses, il a fallu lui laisser du temps afin qu’il puisse comprendre ce que nous lui demandions… »
La tactique de course
Au vu du nombre de poulains qui figurent toujours parmi les engagés, l’édition 2023 du Prix du Jockey Club ne devrait pas faire le plein en partants : « Cette année, nous n’allons pas être nombreux au départ. C’est un avantage pour Feed the Flame. C’est un poulain qui a une façon de courir qui lui est propre : il patiente avant de produire son effort dans la phase finale. Donc, si pour cette course nous allons à l’encontre de la façon dont il est monté habituellement, il est certain que vous allez le mettre dans le ‘’rouge’’ et évident qu’il ne finira pas. En partant, le poulain va avoir besoin d’un peu de temps pour se mettre en jambes. Mais, sur les 2.100m de la piste de Chantilly, si la course est sélective, il n’aura aucun mal à revenir… encore moins s’il est bon. Même si nous héritons du numéro de corde le plus à l’extérieur, avec douze ou treize partants, cela ne devrait pas être trop handicapant. Lorsque l’épreuve se disputait sur 2.400m, il arrivait que certains soient mal embarqués pendant la course, mais ils parvenaient quand même à bien conclure leur parcours. Là, sur 2.100m, il va évidemment falloir qu’il se rapproche à un moment ou à un autre… »
Le bon terrain ? Pas un souci !
En deux sorties, Feed the Flame a foulé deux natures de sol bien différentes. Son entraîneur part confiant concernant ce paramètre : « Le poulain a débuté sur un terrain bon souple (3,3). Ensuite, sa deuxième course a eu lieu en terrain très souple (3,9). Feed the Flame a travaillé deux fois sur la piste de Chantilly, il n’y a donc aucune raison que le terrain soit un problème pour lui, d’autant que la lice sera à zéro, que la piste sera neuve et qu’il devrait donc y avoir beaucoup d’herbe… »
Le choix de Christophe Soumillon
Cette année, Christophe Soumillon avait plusieurs possibilités dans le Jockey Club. Rajapour (K) (Almanzor) et American Flag (K) (Wootton Bassett) notamment : « C’est l’un des meilleurs jockeys au monde. Depuis le début de cette année, il n’est plus tenu par un contrat et je lui ai dit que j’avais un bon cheval. Il est ensuite venu le monter le matin et il a toujours été de mon avis. Depuis, le cheval et l’homme ont été associés à deux reprises en compétition. Christophe aime bien le cheval, il le connaît bien également. Avec les chevaux, il faut savoir respecter leurs qualités comme leurs défauts. Ce n’est pas Feed the Flame qui doit s’adapter à moi ou à Christophe, mais plutôt nous qui devons s’adapter à lui. C’est la seule façon pour que l’alchimie fonctionne ! »
Son entraîneur le pense meilleur sur 2.400m
Disputé depuis 2005 sur la distance de 2.100m, le Prix du Jockey Club ancienne formule, sur 2.400m, n’aurait pas dérangé Feed the Flame. Bien au contraire : « J’ai l’impression qu’il sera encore meilleur sur 2.400m. Contrairement à ce que ses origines pourraient laisser entendre, c’est ce que le poulain nous laisse à penser. Toutefois, dimanche, en ayant déjà couru à deux reprises, Feed the Flame devrait être plus rapidement en course. Ceci dit, au vu de son accélération, je pense qu’il sera encore mieux sur 2.400m. »
Pascal Bary et Jean-Louis Bouchard, une histoire d’amis avant tout
Autour de Feed the Flame, trois personnes gravitent : Pascal Bary, Jean-Louis Bouchard et Gérard Larrieu, courtier et ami des deux hommes. L’entraîneur explique : « Cela fait plus de quarante ans que nous avons des chevaux ensemble avec Jean-Louis Bouchard. Nous avons connu de très belles périodes, comme de moins bonnes évidemment. C’est un homme qui aime les courses et surtout les chevaux. Avec lui, c’est très simple de collaborer. Il comprend tout. Il a toujours aimé les bons chevaux et il est servi avec Feed the Flame. Et puis, pour l’anecdote, Jean-Louis Bouchard allait aux courses bien avant moi (rires). »
Continuer à prendre du plaisir
À 70 ans, Pascal Bary est un homme heureux. Et une nouvelle fois, il goûte au plaisir d’entraîner un bon cheval : « Évidemment, je suis beaucoup plus proche de la fin de ma carrière que du début. Je me rends compte de ce que cela peut être d’avoir un très bon cheval et je prends beaucoup de plaisir à entraîner Feed the Flame. Cependant, je ne vois pas ce Prix du Jockey Club comme étant la dernière belle course de ma carrière (rires). J’espère qu’il y en aura encore bien d’autres ! »