Big Rock, Big questions ?
Par Thomas Guilmin
tg@jourdegalop.com
Comment Big Rock (Rock of Gibraltar) a-t-il pu passer du statut de bon cheval de handicap à favori du Qatar Prix du Jockey Club ? Et, par conséquent : est-il aujourd’hui capable de gagner le Jockey Club de cinq longueurs ? A-t-il eu une course dure mardi ? L’écart qui le sépare de ses adversaires reflète-t-il la réalité ?
Après avoir commencé sa carrière chez Mathieu Brasme, où il avait (déjà ) montré de la qualité sans néanmoins s’illustrer en trois sorties dans des maidens, Big Rock a rejoint l’effectif de Christopher Head. Dès sa première sortie pour l’entraîneur cantilien, le poulain avait beaucoup changé physiquement : il était devenu plus massif. Chaque entraîneur a sa méthode, et l’on sait que les protégés de Christopher Head travaillent en intensité le matin. Cette manière de faire a bien convenu à Big Rock, dont le physique est solide. Depuis le début de l’année, Big Rock ne cesse de repousser ses limites depuis ses démonstrations dans le Prix Maurice Caillault (L), le Prix La Force et maintenant dans le Prix de Guiche (Grs3)
Il a l’avantage d’avoir couru tout l’hiver
Comment a-t-il pu dominer nos meilleurs 3ans dans les préparatoires ? Big Rock a été vu tout au long de l’hiver puisqu’il a débuté sa carrière à Fontainebleau le 25 novembre dernier. Cela fait donc sept mois qu’il est sur la brèche.
Un poulain qui encaisse bien ses courses
Lors de ses quatre derniers succès consécutifs, l’impression visuelle laissée est exaltante. À tel point que l’on peut parfois oublier qu’il pourrait prendre une ‘’vraie’’ course… En tout cas, pour le moment, Big Rock ne semble pas demander à lever le pied. Mardi, à son retour aux balances, il ne soufflait pas beaucoup alors qu’il en était déjà à son troisième sacre au niveau black type. Ce poulain encaisse manifestement bien ses courses et repousse ses limites en permanence grâce à une constitution physique assez hors-norme.
La tactique de course, un élément clé
Depuis qu’il est chez Christopher Head, Big Rock a pratiqué la course en avant en imprégnant un rythme assez sélectif. Ce scénario de course est plus souvent vu de l’autre côté de la Manche ou encore au Japon, mais très rarement en France. Car, chez nous, les courses se jouent surtout sur un sprint. Et nous le constatons assez souvent lorsque les étrangers viennent en imprégnant leur rythme. Ils sont difficiles à aller chercher ! Avec Big Rock, c’est la même chose : sa tactique de course lui donne un avantage face à ses adversaires. Pourtant, avant le Prix de Guiche, ce scénario de course avait déjà été privilégié dans les Prix Maurice Caillault et La Force.
Un poulain “tout terrain” également
Mardi, son jeune entraîneur n’a pas manqué de signaler que Big Rock était capable de s’adapter à tous types de terrain, et il a raison. Son pensionnaire a triomphé par deux fois sur le sable de Chantilly, remportant ensuite La Force en terrain bon souple, et le Prix de Guiche sur une piste annoncée collante, voire lourde. Surprenant ? Pas vraiment. Car son père, Rock of Gibraltar (Danehill), est réputé pour faire des chevaux avec une aptitude aux pistes pénibles. Du côté maternel, il en est de même, sa mère étant par Sea the Stars (Cape Cross) et la deuxième mère par Pivotal (Polar Falcon). Il fallait donc plutôt se poser cette question lorsqu’il a triomphé deux fois sur la P.S.F.
Une opposition contrastée
Qu’en est-il des chevaux qu’il a battus dans le Prix de Guiche ? Le deuxième, Horizon Doré (Dabirsim), et le troisième, Grey Tornado (The Grey Gatsby), ont joué leur carte à fond. L’un étant hongre ; l’autre certainement trop juste pour espérer figurer dans le classique. Les deux pensionnaires de Jean-Claude Rouget, Padishakh (K) (Wootton Bassett) et Rajapour (K) (Almanzor), ont rapidement rendu les armes dans ce terrain exigeant, et leurs jockeys respectifs n’ont pas insisté afin d’éviter qu’ils prennent une course dure. Quant à Flight Leader (Frankel), l’atout d’André Fabre, il a conclu dernier ! Pourtant, quelques semaines plus tôt, il avait triomphé dans le Prix Noailles (Gr3) sur une piste mesurée collante (4,3), même si cela paraissait moins pénible. L’état du terrain et la forme de certaines écuries – probablement liées au rhinovirus qui sévit un peu partout – doivent expliquer les écarts très importants constatés à l’arrivée sans remettre en cause la performance du gagnant.
Un des favoris logiques du Jockey Club ?
Avant le sacre de Vadeni (K) (Churchill) en 2022, aucun poulain n’avait été capable de triompher de cinq longueurs dans le Prix du Jockey Club, dans la version sur 2.100m. Il était donc impossible de l’envisager. Mais avec Big Rock, il est de nouveau possible de se poser la question puisque ses quatre dernières victoires ont été obtenues avec une moyenne de 3,8 longueurs d’avance sur ses dauphins. Toutefois, d’autres paramètres vont entrer en ligne de compte le 4 juin prochain. Et tout d’abord le numéro de corde. S’il se retrouve à l’extérieur, Big Rock va devoir fournir un gros effort en partant pour ensuite s’installer en tête de course. En revanche, s’il est chanceux lors du tirage au sort, Big Rock pourrait bien dicter sa loi une nouvelle fois. Mais à une condition : il ne faut pas qu’il soit contrarié par un leader ou par un autre concurrent qui voudrait également pratiquer la course en avant. En tout cas, une chose est sûre, on ne lui interdit rien ! Big Rock a encore le droit de nous impressionner, mais il ne sera évidemment pas seul : Ace Impact (Cracksman) a impressionné dans le Prix de Suresnes (L), tout comme l’invaincu en deux sorties Feed the Flame (K) (Kingman) ou encore Greenland (Saxon Warrior), le gagnant du Prix Greffulhe (Gr3). Autant de sérieux clients…